Les observateurs de l'ONU qui arrivent dimanche en Syrie pour surveiller la cessation des hostilités entament une mission périlleuse en l'absence d'accord formel de cessez-le-feu entre les forces gouvernementales et l'opposition armée.
"Pas de cessez-le-feu, pas même le début d'un processus politique: cette mission sera une des plus difficiles jamais entreprises par l'ONU", estime un diplomate.
La résolution 2042 adoptée samedi par le Conseil de sécurité et qui a autorisé le déploiement dans les prochains jours de 30 observateurs militaires non armés stipule que le gouvernement syrien est responsable en premier lieu de leur sécurité.
Mais à la suite des nouvelles attaques constatées samedi, plusieurs ambassadeurs occidentaux ont exprimé des doutes sur la volonté du président Bachar Al-Assad de respecter la cessation des hostilités qui est entrée en vigueur jeudi matin.
Les Nations unies envoient souvent des observateurs dans les zones de conflit, ils sont "les yeux et les oreilles du Conseil de sécurité".
Mais les observateurs qui se sont interposés entre les forces indiennes et pakistanaises en 1948, entre chypriotes grecs et turcs à Chypre en 1974 et entre rebelles maoïstes et forces gouvernementales au Népal en 2006 l'ont fait à la suite de la signature d'accords formels de cessez-le-feu.
Les premiers observateurs, une demi-douzaine, ont pris l'avion pour Damas dès l'adoption de la résolution et doivent arriver dimanche, selon Kieran Dwyer, porte-parole du département des opérations de maintien de la paix de l'ONU. Ils seront suivis de 25 autres "dans les prochains jours". A terme, et à condition que le fragile cessez-le-feu de facto tienne, l'ONU prévoit que la mission compte environ 250 hommes, avec leurs moyens de transport et de communications.
Ces observateurs proviendront notamment des contingents de Casques bleus opérant "dans la région", a précisé M. Dwyer, "afin de les déployer rapidement et d'avoir du personnel expérimenté".
Selon des diplomates, il pourrait s'agir par exemple de la mission de l'ONU sur le Golan, ou de celles au Soudan et au Soudan du Sud.
La première tâche de cette mission préparatoire sera "d'établir un quartier général opérationnel" à Damas, a expliqué M. Dwyer. Ils prendront ensuite contact avec le gouvernement syrien, les forces gouvernementales et celles de l'opposition "afin que les deux camps comprennent ce que sera leur rôle de surveillance et qu'ils puissent mettre en place un système de contrôle".
Ils se rendront aussi "dans d'autres villes de Syrie pour décider où établir des bases" afin de surveiller le cessez-le-feu sur l'ensemble du territoire.
L'équipe préparatoire devra "se déplacer et prendre des contacts de manière quotidienne et vérifier que la violence a vraiment cessé", a-t-il ajouté.
Les observateurs rendront compte au médiateur de l'ONU et de la Ligue arabe Kofi Annan et au siège de l'ONU à New York, de façon à ce que le Conseil de sécurité puisse décider des étapes suivantes de leur mission.
Cette mission de supervision du cessez-le-feu n'est qu'un des aspects du plan de paix en six points de Kofi Annan, que Damas a accepté. Le plan prévoit aussi un dialogue politique entre pouvoir et opposition en vue d'une transition démocratique.
M. Annan "continuera de travailler sur les autres élements de son plan en six points", a souligné M. Dwyer. "Les observateurs ne vont pas faire de travail politique et il ne faut pas attendre trop" de cette mission, a-t-il prévenu.
"Comme l'ont dit le Conseil de sécurité et le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon, a-t-il rappelé, il incombe au gouvernement syrien et à l'opposition de cesser toute forme de violence et de faire en sorte que cette cessation des hostilités soit respectée durablement".
Les attaques de samedi, notamment le bombardement de Homs (centre) et la mort de civils à Alep (nord), sont venus rappeler les dangers de cette mission, comme l'ont souligné au Conseil plusieurs ambassadeurs occidentaux.
"Ce regain de violence fait douter à nouveau sérieusement de la volonté du régime" syrien de respecter le cessez-le-feu, a estimé l'ambassadeur américaine à l'ONU, Mme Susan Rice.
"Les violences ont décru mais les attaques subies par la population civile aujourd'hui à Homs confirment les doutes que l'on peut avoir sur la réalité de l'engagement du régime syrien", a estimé l'ambassadeur français Gérard Araud.