Alors que le budget pour l’année 2025 est actuellement examiné au Sénat, le gouvernement a déjà confirmé plusieurs rétropédalages sur des mesures qui ont suscité la polémique. Plusieurs milliards d’euros d’économies ne seront ainsi pas réalisées.
Les parlementaires ont donné le ton : à l’Assemblée nationale, la copie initiale du gouvernement a été largement remaniée par les députés, avant son départ pour le Sénat. Au sein de la chambre haute, les sénateurs devraient en faire de même afin de modifier un texte dont certaines mesures ont été très mal reçues par les Français.
Aides aux collectivités locales, désindexation des pensions de retraite sur l’inflation, ou encore baisse des allègements de charges patronales : Michel Barnier multiplie les rétropédalages et pourrait poursuivre sa marche arrière forcée.
La communication du gouvernement était claire : l’État doit réaliser 60 milliards d’euros d’économies dont 20 milliards d’euros de hausses d’impôts et 40 milliards d’euros de réductions de la dépense publique. C’est d’ailleurs conformément à ces recommandations qu’a été pensé et construit le budget 2025. Mais depuis le mois d’octobre, le chef du gouvernement est revenu sur certaines propositions, concédant plusieurs milliards d’euros face à la grogne des oppositions et des acteurs concernés par les économies.
Les collectivités territoriales, les retraites et cotisations patronales
C’est notamment le cas des collectivités territoriales. Alors que le gouvernement prévoyait de réaliser a minima cinq milliards d’économies en ciblant notamment les grandes municipalités et les départements, accusés de largement participer à la dérive des finances publiques, de nombreux élus sont montés au créneau, à l’image de la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui a dénoncé un «hold-up», et annoncé de fortes répercussions sur les Parisiens. Depuis, Michel Barnier a fait marche arrière en indiquant qu’il comptait «réduire très significativement l’effort demandé».
Autre exemple : le report de la hausse des pensions de retraite. Dans le texte initial, le budget prévoyait une désindexation temporaire des retraites sur l’inflation, qui aurait eu pour conséquence de retarder l’augmentation des pensions du 1er janvier au 1er juillet 2025, le tout pour une économie de quatre milliards d’euros. Mais après plusieurs remontées négatives, le député LR Laurent Wauquiez a annoncé avoir négocié avec Matignon pour obtenir une revalorisation des retraites de 0,9% en janvier puis en juillet, avec avec un geste supplémentaire pour les petites pensions. La mesure devrait coûter environ 800 millions d’euros à l’État.
Enfin, le sujet brûlant de l’allègement des charges pour les entreprises a lui aussi été raboté. C’était une autre promesse de Michel Barnier au moment de sa prise de fonctions : faire participer les entreprises à l’effort national. Pour ce faire, le PLF prévoyait de s’attaquer aux réductions de cotisations patronales, qui ont doublé en dix ans et qui coûtent 80 milliards d’euros par an. Le Premier ministre entendait ainsi réaliser quatre milliards d’euros d’économies. Mais tantôt le patron du Medef, Patrick Martin, tantôt le ministre de l’économie, Antoine Armand, ont convaincu Michel Barnier d’enclencher la marche arrière. Le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, a finalement divisé la note par deux : la réforme ne rapportera que deux milliards d’euros.
Sous pression face à l’opposition, et notamment Marine Le Pen, qui menace de soutenir une motion de censure sur le budget, Michel Barnier voit sa marge de manoeuvre se réduire jour après jour. Alors que les deux responsables politiques se sont entretenus ce lundi, d’autres mesures considérées comme des «lignes rouges» par le Rassemblement national pourraient disparaître du texte, si le Premier ministre ne souhaite pas lui même «disparaître» de Matignon et entraîner son gouvernement dans sa chute.