Le Conseil national de l'Ordre des médecins a lancé ce lundi une enquête auprès de tous les médecins, y compris les internes, sur les violences sexistes et sexuelles subies dans le cadre professionnel. Les résultats seront publiés fin 2024.
Une enquête de grande envergure. Malgré l’émergence récente d’un #MeTooHôpital, les violences sexistes et sexuelles (VSS) semblent perdurer au sein des établissements de santé. Face à la vague de témoignages de médecins, internes, et autres soignantes intervenue au printemps, une vaste enquête sera réalisée dans les prochains jours auprès d’environ 285.000 professionnels et internes, partout en France.
Selon le Conseil national de l'Ordre des médecins, qui pilote cette initiative, l’objectif est de «mesurer l'ampleur du phénomène, d'identifier les types de violences les plus fréquents et les contextes dans lesquels elles se produisent», afin «d’orienter les actions de lutte contre les violences sexistes et sexuelles».
«Tous les médecins inscrits à l'Ordre et tous les docteurs junior (internes dans leur dernière phase de formation), recevront par e-mail un questionnaire, garantissant leur anonymat, et pourront répondre jusqu'au 14 octobre», indique le Conseil de l'Ordre (Cnom) dans un communiqué. L'Ordre «encourage tous les médecins» à répondre pour avoir les données les plus «fiables et représentatives» possibles.
39% des femmes médecins victimes de comportements sexistes
En avril, les révélations de l'infectiologue Karine Lacombe ont suscité de nombreux témoignages, sur les réseaux sociaux et auprès d'associations professionnelles et étudiantes, sur les violences sexistes et sexuelles dans le milieu de la Santé. Beaucoup de soignantes ont dénoncé une «culture carabine» et «patriarcale» installée notamment à l'hôpital, et une tradition d'omerta favorable aux VSS. C’est également le constat du dernier baromètre «Donner des ELLES à la santé» réalisé en juin 2024 par Ipsos auprès de 521 médecins, dont la moitié sont des femmes.
Selon les résultats de l'enquête, parmi les femmes médecins interrogées, 39% déclarent avoir été victimes de comportements sexistes dans l’hôpital au cours de l’année écoulée. Plus en détail, près d’une médecin interrogée sur trois (29%) a été confrontée cette année à des propos sexistes sur ses compétences, plus d’une sur quatre (26%) sur son apparence physique ou sa tenue vestimentaire et près d’une sur cinq (19%) à des questions intrusives sur sa vie privée ou sexuelle.
Les quatre précédents baromètres faisaient état de près de 80% de femmes médecins à avoir été victimes de ce type de comportements depuis le début de leur carrière.
40% des hommes n'ont pas dénoncé les comportements problématiques
Les hommes médecins ont également été interrogés dans cette étude. Seuls 56% d’entre eux disent avoir été témoins de tels comportements sexistes au cours des 12 derniers mois. Parmi eux, deux sur cinq (40%) ne les ont pas dénoncés, «soit parce qu’ils n’avaient pas compris que c’était anormal, soit parce qu’ils se disaient que l’auteur était intouchable, notamment l’auteur médecin, ou que l’institution ne les croirait pas», détaille la présidente de Donner des ELLES pour la santé.
D’après le baromètre, moins d’un médecin hospitalier sur cinq (19%) connaît l’existence d’un référent en matière de harcèlement sexuel dans son établissement et seulement 6% savent précisément qui il est.
L'ex-ministre de la Santé, Frédéric Valletoux, avait mené des concertations et annoncé fin mai plusieurs mesures dont la mise en place d'une formation pour tous les personnels.