Le ministre chargé du Logement, Guillaume Kasbarian, doit présenter son projet de loi pour lutter face à la crise du logement et de l'immobilier, ce vendredi en Conseil des ministres. Voici les principales mesures qu’il contient.
Alors que la France fait face à une crise historique du logement, avec notamment une baisse de 40% des permis de construire observée depuis deux ans, ainsi qu’une forte hausse des taux d’intérêts, qui devraient toutefois baisser en 2024, le gouvernement doit présenter ce vendredi des solutions pour faciliter l’accès des Français à une offre locative abordable et à la propriété.
Faciliter la construction de nouveaux logements
L’une des premières mesures du projet de loi concerne la construction de logements. L’exécutif entend donner de nouveaux outils aux maires, constructeurs, promoteurs et bailleurs sociaux pour produire plus de logements. Le gouvernement propose par exemple de passer de six à deux mois les délais de recours pour un permis de construire, un gain de temps qui doit permettre d’économiser «3% du prix d’une opération».
Le gouvernement souhaite par ailleurs permettre aux maires de densifier plus facilement les lotissements en autorisant les constructions à ceux qui disposent de grands terrains qui pourraient accueillir de nouveaux logements. L’exécutif souhaite enfin permettre à un opérateur de ne déposer qu’un seul permis pour plusieurs projets d’aménagement et de construction plutôt que d’en déposer un par site.
Intégrer les logements intermédiaires dans la loi SRU
La grande nouveauté de ce plan est la «modification de la loi SRU». Si elle ne sera pas retoquée en tant que telle, l’article 1 du projet de loi ouvre la possibilité d’inclure jusqu’à 25% de logements intermédiaires dans les objectifs de construction pour les collectivités concernées par la loi. Un logement locatif intermédiaire est un logement dont les niveaux de loyers se situent entre le marché social et le marché libre (loyer inférieur de 15 à 20% par rapport au marché classique). Une commune qui aurait par exemple pour objectif de produire 1.000 logements sociaux sur trois ans pourrait ainsi inclure jusqu’à 250 logements intermédiaires.
Alors que deux tiers des Français sont éligibles au logement social, la France dispose «seulement» de 5,5 millions de logements sociaux sur 33 millions de résidences principales. Il existe actuellement près de deux millions de demandeurs de logements sociaux (hors du parc social) et seulement 140.000 logements intermédiaires. L’idée du gouvernement est donc de favoriser la construction de logements intermédiaires et de les intégrer dans la loi SRU, afin soutenir la classe moyenne qui a du mal à se loger en cas de salaires situés au-dessus des revenus priorisés dans la liste d’attente du logement social.
Le gouvernement précise toutefois que l’objectif de 25% de logements sociaux demeure, que les communes concernées restent les mêmes, et que les sanctions pour les contrevenants ne changent pas.
Abaisser le plafond de ressources
Afin de favoriser la rotation du parc HLM, le gouvernement entend baisser le plafond de ressources pour obtenir un logement social. Il existe différents types de logement à loyer modéré qui sont généralement désignés en fonction du mode de financement qui en a permis la construction ou la rénovation, et en fonction du niveau de rémunération des demandeurs. Ce niveau est appelé «plafond de ressources».
Avec le nouveau projet de loi du gouvernement et l’abaissement du plafond de ressources, un célibataire sans enfant habitant à Paris devra quitter son logement social s’il gagne plus de 3.724 euros net par mois, contre 4.655 euros aujourd’hui, soit une diminution de 931 euros. Un couple avec deux enfants en logement social en province devra quitter le logement s’il gagne plus de 6.278 euros net par mois, contre 7.847 euros aujourd’hui, soit une différence de 1.569 euros.
Le gouvernement précise que les seuils restent «très élevés» et que la moitié des couples demandeurs de logements sociaux à Paris gagnent moins de 3.100 euros nets par mois et moins de 2.200 euros nets par mois en région.
Appliquer la règle des surloyers
Selon les chiffres du gouvernement, 8% des locataires actuels d’un logement social sont au-dessus du plafond de ressources fixé pour y entrer. Le projet de loi propose donc d’appliquer plus strictement la règle des «surloyers», c’est-à-dire une augmentation du loyer d’un logement social, qui s’appliquera «dès le premier euro de dépassement du plafond de ressources» et non pas, comme aujourd’hui, «en cas de dépassement de plus de 20%».
Si le plafond est dépassé de 20% pendant deux années de suite, le bailleur devra résilier le bail automatiquement, avec toutefois un délai de prévenance de 18 mois. Cette résiliation ne s’appliquera pas aux personnes âgées ou handicapées.
Intégrer le patrimoine des locataires
Autre nouveauté du projet de loi : la prise en compte du patrimoine des locataires. Aujourd’hui, aucune évaluation du patrimoine n’est prise en compte. Il est possible d’être locataire d’un logement social et d’avoir hérité d’une ou plusieurs résidences secondaires tout en passant sous les radars. Le gouvernement entend faire de cet élément un critère de mobilité. Désormais, le patrimoine sera comptabilisé et un propriétaire ayant acquis un «bien équivalent» à son logement (un décret précisera la définition du «bien équivalent») devra quitter son logement social.
Les bailleurs pourront faire des croisements d’information avec l’administration fiscale, et le cas échéant, résilier les baux des contrevenants avec un délai de prévenance de 18 mois, à l’exception, à nouveau des personnes de plus de 65 ans et familles avec enfants handicapés.
Donner plus de pouvoirs aux maires
Enfin, l’article 2 du projet de loi prévoit d’autoriser les maires à présider les commissions d’attribution des logements sociaux et de prioriser les habitants qui y entrent. La structure d’attribution (préfet, organismes sociaux…) reste la même mais le maire choisira parmi les profils qui lui ont été proposés. Le gouvernement souhaite ainsi donner aux maires un droit de regard sur le peuplement des logements sociaux qu’ils autorisent.