Plusieurs vidéos sur les réseaux sociaux montrant une danse populaire dans certaines boîtes de nuit ont défrayé la chronique. Et pour cause, le «bouyon» une danse née aux Antilles dans les années 1980, mime des actes sexuels qui peuvent paraître dégradants pour certains, mais totalement assumés par ses pratiquants.
On les appelle les «bouyonneurs». Rompus à l’exercice depuis déjà plus d’une quinzaine d’années, ces danseurs de «bouyon» ont connu un regain de popularité ces dernières semaines au travers de vidéos postées sur les réseaux sociaux, et notamment sur TikTok, où leurs danses mimant des actes sexuels sont mises en valeur par certains et dénoncées par d’autres, qui déplorent une sexualisation à outrance auprès d’un public jeune.
Une danse qui mime des actes sexuels
Popularisé aux Antilles dans les années 1990, d’abord sur l’île de la Dominique, puis en Martinique et en Guadeloupe, le bouyon est arrivé en métropole depuis près de 20 ans, jouissant d’une popularité grandissante, notamment dans certains établissements de nuit, dont le célèbre Métropolis, une discothèque de Rungis, dans le Val-de-Marne. Cette danse endiablée qui mime l’acte sexuel, dégradante pour certains mais totalement assumée par ses pratiquants caracole en tête des tendances sur TikTok ou sur Snapchat.
Dans ces vidéos, on peut apercevoir des jeunes femmes, courbées, les jambes légèrement écartées, tête vers le bas, et mains au sol ou contre un mur, dansant avec un homme derrière-elles, qui effectue des mouvements de bassin d’avant en arrière pour mimer l’acte sexuel, le tout entrecoupé de quelques mouvements de danse et autres rotations. Conformément à l’usage, les femmes restent passives, acceptant les mouvements rapides de leur partenaire contre leurs fesses.
Si cette danse peut paraître choquante pour certains, ses défenseurs évoquent une danse traditionnelle qui s’effectue sur des musiques antillaises, comme le zouk à son époque. Aujourd’hui le bouyon se pratique sur des musiques plus entrainantes, qui peuvent atteindre les 162 battements par minute (BPM), là où le tempo moyen de la musique électro varie entre 120 et 140 BPM. Le bouyon tient donc aussi sa popularité du rythme effréné qui fait danser ses adeptes.
Les "bouyonneurs" reconnus du Loft Métropolis, à Rungis (Val-de-Marne) ont accepté de répondre à nos questions. pic.twitter.com/3swQ00WFsD
— Nolwenn Cosson (@NolwennCosson) March 29, 2024
Faire «le buzz» sur les réseaux sociaux
«C’est la fusion entre la cadence lypso et le jing-ping, deux genres musicaux créés par des esclaves. On retrouve cette musique dans les carnavals, dans les ambiances de soirées» détaille Esther Eloidin, chercheuse en ethnomusicologie des Antilles, pour Le Parisien.
«Après la Dominique, le bouyon s’est ensuite exporté en Martinique et surtout en Guadeloupe, où le style est devenu plus violent, avec des paroles très portées sur le sexe, et des danses frénétiques. Ces chansons dénoncent les vilaines filles qu’on traite par exemple de vieilles cochonnes, parlent d’infidélité et font l’apologie du plaisir sexuel et de l’acte en soi. C’est une manière de choquer, mais aussi de faire le buzz», analyse la chercheuse.
Mais plus qu’une question d’éthique, le véritable problème dénoncé par les détracteurs du bouyon reste la diffusion des images sur les réseaux sociaux, notamment auprès des plus jeunes. En raison des multiples tendances TikTok, ou bien des stories Snapchat, le bouyon est particulièrement diffusé sur les écrans des jeunes de 12 à 25 ans, ce qui peut nuire à leur développement, notamment en leur offrant une image hypersexualisée de la femme.