Ce mercredi, Emmanuel Macron va faire entrer le résistant d'origine arménienne Missak Manouchian au Panthéon, qui est depuis plus de cent ans la nécropole laïque des «Grands Hommes» français, dont la «patrie reconnaissante» souhaite honorer la mémoire. Voici tout ce qu’il faut savoir sur ce lieu.
Un symbole français. Depuis plus de cent ans, le Panthéon abrite des figures de l’histoire de France. Simone Veil, Voltaire, Victor Hugo, Joséphine Baker et bientôt Missak Manouchian font partie des personnes inhumées dans ce monument.
Imposant édifice, le Panthéon domine la montagne Sainte-Geneviève, l'une des buttes de Paris, située dans le 5e arrondissement de la capitale.
Au Moyen Âge, une abbaye abritant les reliques de Sainte-Geneviève s’y trouvait, avant que Louis XV ne demande à ce qu’une nouvelle église soit construite entre 1764 et 1790.
Mirabeau, premier panthéonisé
En 1791, pendant la Révolution française, l'Assemblée constituante a transformé cette église en nécropole nationale. Le Panthéon, d'un mot grec qui désigne l'ensemble des dieux, devient ainsi un temple destiné à «recevoir les grands hommes de l'époque de la liberté française».
Le Comte de Mirabeau, l'un des inspirateurs de la Révolution, a donc été le premier à y entrer le 4 avril 1791. Il est suivi par Voltaire, la même année, et Jean-Jacques Rousseau en 1794.
Plus tard, en 1806, Napoléon a décidé de rendre l'édifice au culte, mais sous le roi Louis-Philippe l'église est redevenue Panthéon, jusqu’à ce que Napoléon III ne décide à son tour de lui rendre son nom d'église Sainte-Geneviève.
Ce n’est que le 1er juin 1885, lors de l'inhumation de Victor Hugo, que le monument est redevenu le «temple» de la République.
une palette d'univers représentés
Parmi les figures qui ont été panthéonisées, il y a des politiques, des écrivains, des scientifiques, des résistants, des religieux et beaucoup de militaires, soit soixante-dix-huit personnalités, dont six femmes, depuis 1907.
Quatre autres personnes - bientôt cinq avec Mélinée Manouchian, l'épouse de Missak qui reposera à ses côtés - y sont inhumées sans décret de panthéonisation. Il s’agit de l'architecte du monument Jacques Soufflot, Sophie Berthelot aux côtés de son mari, Antoine Veil au côté de son épouse, et le père de Victor Schoelcher.
Le philosophe René Descartes attend quant à lui son transfert depuis plus de deux siècles. Emile Zola (1908), Marie Curie (1995) ou le père des «Trois mousquetaires» Alexandre Dumas (2002) sont eux aussi au Panthéon.
Les figures les plus récemment panthéonisées sont Simone Veil, qui a été «honorée» en 2018, l’écrivain et ancien poilu Maurice Genevoix en 2020 et la vedette franco-américaine du music-hall et résistante Joséphine Baker, qui a été la première personnalité noire et première artiste à être panthéonisée fin 2021. Son corps est néanmoins resté à Monaco.
Lors de l’inhumation de Maurice Genevoix, les noms des 560 écrivains combattants de la Première Guerre mondiale ont également été inscrits sur les murs du monument.
Charles de Gaulle a lui voulu être enterré dans son village de Colombey-les-Deux-Eglises (Haute-Marne), tandis que l'ancien garde des Sceaux Robert Badinter, décédé le 9 février 2024, devrait bientôt y faire son entrée.
En 2007, le président Jacques Chirac a décidé de panthéoniser les 2.700 «Justes de France», ainsi que tous les héros anonymes, qui ont «incarné l'honneur de la France» en sauvant des milliers de juifs de la mort pendant la Seconde Guerre mondiale.
Ainsi, Missak Manouchian rejoint ce mercredi d'autres figures françaises de la Résistance, comme Jean Moulin, Pierre Brossolette, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Germaine Tillion ou encore Jean Zay. Ses 22 compagnons d'armes, plus le chef des FTP Parisiens Joseph Epstein, seront aussi l'objet d'un hommage à travers une inscription.
Qui décide de qui est panthéonisé ?
En 1791, lorsque l’église a été transformée en temple national, c'est l'Assemblée constituante qui décidait d'inhumer une personnalité au Panthéon. En 1794, la Convention a pris le relais, notamment avec l'entrée de Jean-Jacques Rousseau.
Ensuite, sous le Premier Empire, la décision revenait à Napoléon 1er avant qu’elle ne soit confiée aux députés sous la IIIe République.
Aujourd'hui, le choix revient désormais au président de la République. Néanmoins, la famille du défunt peut refuser. Comme en 2009, lorsque celle d'Albert Camus s'était opposée à cette idée du président de l’époque, Nicolas Sarkozy.