Le président de la FNSEA a annoncé, mardi 23 janvier, que les blocages des agriculteurs se poursuivront «le temps qu'il faudra» en attendant des réponses «concrètes» à leurs demandes. Depuis, plusieurs professions ont apporté leur soutien au mouvement, laissant planer la crainte, pour l’exécutif, d’une mobilisation générale.
Gilets Jaunes, saison 2 ? Alors qu’une réunion d’urgence doit se tenir, ce jeudi matin, à 8h30 à Matignon, pour tenter d’apaiser la gronde des agriculteurs, la mobilisation ne cesse de s’amplifier, allant jusqu’aux menaces d’un blocage complet de Paris et de toutes les autoroutes qui mènent à la capitale. Un blocage qui a d’ores et déjà reçu le soutien de plusieurs professions, et qui pourrait constituer l’étincelle d’un embrasement plus global. Une hypothèse toutefois peu probable, en raison de la spécificité des revendications des agriculteurs.
Près d’une semaine après avoir débuté en Occitanie, la fronde des agriculteurs s’est propagée dans tout le pays jusqu’à arriver aux portes de l’exécutif ce jeudi. La veille, la FNSEA avait réclamé des aides «immédiates» pour les agriculteurs et un allègement des contraintes environnementales, dans une liste détaillée de demandes adressée au gouvernement. Le premier syndicat agricole français a également exhorté le gouvernement à prendre en compte «l’intégralité» de leurs doléances pour parvenir à une sortie de crise, tout en chiffrant ces efforts à «plusieurs centaines de millions d'euros».
Plusieurs professions solidaires des agriculteurs
Face à cette gronde d’une puissance inédite pour le secteur, d’autres professions ont affiché leur soutien au mouvement. Certaines, de manière individuelle, rejoignant même les rangs des manifestants dans certaines villes. Des chauffeurs routiers ont ainsi aidé les agriculteurs, mardi, à bloquer l’A7, dans la Drôme. «On a décidé de converger avec les agriculteurs parce qu’on a les mêmes revendications qu’eux», a justifié l’un d’eux, évoquant des «problèmes de concurrence déloyale, de prix, de charges, qui sont en train de nous étouffer».
À Agen, mercredi matin, des taxis se sont également mêlés aux tracteurs qui convergeaient vers la préfecture du Lot-et-Garonne, aspergée de lisier en fin de journée. Quelques dizaines de pêcheurs sont aussi attendues ce jeudi à une manifestation prévue à Rennes à l’appel de la Coordination Rurale. Idem du côté des organisations professionnelles dans l’hôtellerie-restauration ou dans la boucherie-charcuterie, qui ont publié des communiqués exprimant leur «soutien» aux agriculteurs.
Des revendications spécifiques et pas d'appel au rassemblement
Alors est-il possible d’effectuer un parallèle avec le mouvement des Gilets Jaunes, qui avait embrasé la France en 2018 ? C’est peu probable à ce stade. Alors que les Gilets Jaunes s’étaient rassemblés autour de mesures consensuelles, comme le prix du carburant ou la vie chère, les agriculteurs ont des revendications diverses, mais spécifiques à leur profession, à l’image de l’allègement des contraintes environnementales, ou encore du maintien d’une niche fiscale sur le gazole non routier (GNR). Seules certaines doléances, comme la hausse des salaires, pourraient faire écho dans d’autres secteurs. Insuffisant, semble-t-il, pour créer une convergence des luttes de l’ampleur des Gilets Jaunes.
Pour l’heure, aucune organisation n’a ainsi appelé officiellement à rejoindre le mouvement. Si les hôteliers restaurateurs ont simplement exprimé leur solidarité, l’Union nationale des taxis (UNT) a clairement annoncé qu’elle ne comptait pas «surfer» sur la contestation des agriculteurs pour avancer ses propres revendications. Même constat chez les pêcheurs, qui manifestent déjà pour leurs droits, ou encore chez les chauffeurs de poids lourd, qui, malgré leur soutien, voient au contraire leur activité très perturbée par le mouvement de colère des agriculteurs et espèrent une issue rapide.
Néanmoins, la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs se sont montrés extrêmement clairs sur leur colère et sur leurs intentions. En cas de réponse trop faible ou inappropriée du gouvernement, la situation pourrait vite dégénérer, et les rangs des manifestants, qui prévoient de s’installer à Paris à partir de ce jeudi, pourraient considérablement gonfler.
Rappelons également que personne n’avait pu prédire le mouvement des Gilets Jaunes et que le climat social du pays reste très instable, après les épisodes pour le moins tumultueux de la réforme des retraites, et de la loi immigration.