Auditionné devant la commission des Lois du Sénat ce mercredi 5 juillet, Gérald Darmanin, est revenu sur l'idée d'accéder plus simplement aux échanges de la population sur les réseaux sociaux en cas de violences.
Si les heurts qui ont suivi la mort de Nahel ont été si difficiles à contenir, c'est, selon Gérald Darmanin, parce que les pilleurs et casseurs étaient organisés «au sens "réseau" du terme». Auditionné devant la commission des Lois du Sénat ce mercredi 5 juillet, le ministre de l'Intérieur, convaincu que les réseaux sociaux ont permis une telle organisation, a suggéré d'autoriser les forces de l'ordre à surveiller ces plate-formes dans de tels cas.
Gérald Darmanin a expliqué qu'à l'heure actuelle, légalement, il ne peut «faire de la captation à distance», c'est-à-dire «entrer dans les téléphones», que dans un «cas terroriste». «Je ne peux pas demander qu'on regarde Instagram, Facebook, Snapchat, Whatsapp, Signal, votre téléphone, dans des cas de grandes violences urbaines, de délinquance, de trafic de drogue», a-t-il développé.
Selon lui, c'est ce qui fait qu'aujourd'hui «on ne peut pas prévoir ce qu'il se passe, on ne peut pas savoir ce qu'il se passe». Lors des émeutes, ce n'est «qu'au bout de 48h», après avoir interpellé les personnes et ouvert des enquêtes judiciaires, «qu'on a pu "péter" les comptes» des émeutiers sur les réseaux sociaux, a précisé Gérald Darmanin.
«Tant que nous resterons dans ce genre de fonctionnement nous aurons des résultats judiciaires, mais après les faits, a-t-il poursuivi. Si vous voulez intervenir avant les faits, il faudra un jour donner les pouvoirs à la police et la gendarmerie». Le ministre de l'Intérieur a demandé aux sénateurs de réfléchir à cette question pour «donner les moyens» aux forces de l'ordre de «casser les réseaux très importants de trafic et notamment de trafic de drogues».
Une question «très compliquée»
Cette surveillance serait selon lui «encadrée» et mise en place «de manière très contrôlée» comme c'est déjà le cas pour les «sujets terroristes». «Je sais que c'est une question très compliquée», a concédé Gérald Darmanin, mais «il va falloir un jour étudier la possibilité que la police et la gendarmerie aient des yeux pour voir et des oreilles pour écouter».
Mardi, face à quelque 300 maires de communes victimes de violences, Emmanuel Macron avait déjà évoqué l'idée «d'avoir une réflexion sur l'usage de ces réseaux chez les plus jeunes», suggérant de se mettre «peut-être en situation de les réguler ou de les couper [...] quand les choses s'emballent pour un moment».
Des propos qui ont suscité la polémique à droite comme à gauche, certains élus faisant le parallèle avec la censure pratiquée dans d'autres pays comme la Chine, l'Iran ou encore la Corée du Nord. Ce mercredi, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a assuré qu'il n'a jamais été question «d'un black-out généralisé», mais potentiellement de «suspensions de fonctionnalités» comme la géolocalisation.
Le ministre chargé de la Transition numérique, Jean-Noël Barrot, a proposé la mise en place d'un groupe de travail sur les mesures à prendre en cas d'émeutes. La première réunion pourrait intervenir mercredi prochain, pour «analyser sur les réseaux sociaux ce qui aurait pu éventuellement dysfonctionner» afin de «formuler sur cette base-là des recommandations».