Après le week-end de Pâques et la traditionnelle parenthèse observée en ce lundi férié, la réforme des retraites est sur le point d'amorcer une semaine décisive. Au programme notamment, une 12e journée de mobilisation jeudi et les décisions du Conseil constitutionnel qui doivent être rendues publiques le lendemain.
La semaine qui s’ouvre s’annonce d’ores et déjà capitale concernant la réforme des retraites, et donnera le ton sur la suite des événements. Plusieurs rendez-vous importants, à la fois pour le gouvernement, les oppositions et les syndicats, auront en effet lieu dans les tout prochains jours.
Cette semaine marque tout d’abord la fin des consultations avec les oppositions promises par la Première ministre. Elisabeth Borne doit ainsi achever ce cercle de négociations, que les syndicats ont qualifié «d’échecs», avec la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, dès demain mardi.
Cette dernière a appelé plusieurs fois au départ de la Première ministre, en raison de l’utilisation de l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le texte sans vote. Marine Le Pen a par ailleurs accusé l’exécutif la semaine dernière de se servir des «groupes d’ultragauche» pour «discréditer la contestation sociale».
Une rencontre qui ne devrait pas aboutir à un quelconque accord avec le gouvernement, Marine Le Pen ayant elle-même déclaré fin mars qu’elle ne «participerait pas à éteindre le feu» de la contestation à la réforme des retraites, alors qu’Élisabeth Borne tente – après avoir fait passer le texte en force – d’apaiser les tensions avec les oppositions et de renouer le dialogue.
Tentatives d'apaisement
Un discours plus pacifiste de la Première ministre qui s’oppose aux récentes déclarations d’Emmanuel Macron, en marge de son déplacement en Chine, qui a nié toute «crise démocratique» en France, et a assuré avoir la légitimité et un mandat clair pour réformer le système des retraites. Face à cette différence de ton, Elisabeth Borne a dû, en fin de semaine, répondre à la polémique, et confirmé son «alignement» sur la position du chef de l’État.
Les différentes consultations menées la semaine dernière par la Première ministre avec d’autres partis s’étaient globalement soldées par des désaccords, que ce soit sur la réforme en elle-même ou sur les méthodes du gouvernement.
Les Républicains se sont rendus au rendez-vous proposé par la Première ministre avec l’objectif de lui faire comprendre qu’il était nécessaire que «le gouvernement apprenne à travailler autrement», déplorant «la précipitation» de l’exécutif sur certains textes, et le peu «d’espace» accordé au dialogue social concernant la réforme. Le groupe LIOT a quant à lui demandé la suspension du projet de loi, et plaide pour le lancement d’un référendum. À gauche, la Nupes a refusé l’invitation de la Première ministre.
Si Elisabeth Borne souhaite l’apaisement, la colère sociale continue toutefois de gronder. L’intersyndicale a appelé à une nouvelle journée de mobilisation jeudi 13 avril, la douzième depuis le début du mouvement. Si cette crise commence à s’enliser, les Français restent très mobilisés contre la réforme, avec des centaines de milliers de manifestants dans les rues presque chaque semaine. Lors de la dernière journée de grève, jeudi 6 avril, 570.000 personnes s’étaient rassemblées pour protester contre le texte dans toute la France, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur, et près de deux millions selon la CGT.
les sages vont parler
Cette nouvelle journée de mobilisation a lieu la veille du point culminant de cette semaine décisive : les décisions du Conseil constitutionnel, qui doivent être rendues vendredi en fin de journée.
Les Sages ont été saisis pour se prononcer sur deux points : le premier est la constitutionnalité du projet de financement de la sécurité sociale, dans lequel est incluse la réforme des retraites. Ils peuvent ainsi le censurer complètement, ce qu'espèrent les syndicats et les oppositions, ou bien partiellement, point par point. Ils pourraient ainsi retoquer certaines mesures, comme l'index sénior, mais conserver le report de l'âge légal de départ à la retraite à 64 ans.
Le Conseil constitutionnel doit également rendre une autre décision très scrutée : celle sur le référendum d'initiative partagée (RIP) demandé par la gauche. S'il valide cette procédure, le report de l'âge légal pourrait ainsi être soumis à la consultation nationale. Selon un sondage de l'institut CSA pour CNEWS réalisé fin mars, 69% des Français sont favorables à l'organisation d'un référendum pour trancher la question des retraites. Plusieurs enquêtes d'opinion ont par ailleurs souligné le fait que les Français semblent très majoritairement opposés à la réforme des retraites, notamment les actifs. L'organisation d'un référendum, bien que longue et complexe, pourrait donc être le prochain rebondissement de cette crise politique.