Emmanuel Macron est arrivé aux Etats-Unis ce mercredi pour sa deuxième visite d’État dans ce pays qui se tient jusqu'à vendredi. Pour l’occasion, le président de la République s’est entouré d’une délégation de prestigieuses personnalités françaises. À cet égard, une jeune astrophysicienne de 32 ans, Fatoumata Kebe, a également été invitée. Portrait.
Une délégation variée et également spatiale. Alors qu’Emmanuel Macron s’est envolé pour les États-Unis ce mardi, afin d’y honorer sa deuxième visite d’État, le président de la République s’est entouré de sommités françaises, expertes dans leur domaine.
Pour évoquer l’un des enjeux de cette visite diplomatique, la conquête spatiale, le président de la République a choisi d’inviter une jeune astrophysicienne considérée comme l’étoile montante de sa profession, Fatoumata Kebe.
Aux côtés des spationautes Thomas Pesquet et Sophie Adenot, Fatoumata Kebe représentera ainsi la France aux États-Unis cette semaine, afin d’évoquer les différents enjeux, notamment scientifiques, de la conquête de l’espace. Astrophysicienne, ingénieure, entrepreneure, et titulaire d’une thèse en «modélisation des débris spatiaux», à l’Agence Spatiale Européenne (ESA), et à l’Institut de Mécanique Céleste et de Calcul des Éphémérides, Fatoumata Kebe est aujourd’hui considérée comme une figure majeure, parmi les spécialistes de l’espace, à tout juste 32 ans.
une Enfance en seine-saint-denis
Originaire de Noisy-le-Sec, en Seine-Saint-Denis (93), Fatoumata Kebe a dû affronter de nombreux obstacles avant d’embrasser une telle carrière. Alors qu’elle est une bonne étudiante, rigoureuse, et passionnée par les sciences et les mathématiques, ses professeurs doutent de son potentiel, et ses parents préfèrent qu’elle travaille rapidement pour subvenir à ses besoins.
«Je voulais faire une prépa scientifique, mais mon professeur de mathématiques pensait que c’était impossible pour une étudiante du 93, il ne croyait pas en moi et m’a fait un super mauvais dossier. Par dépit, je me suis inscrite à l’Université», confiait-elle en 2014 à France Info. Alors que personne ne semble croire en elle, Fatoumata Kebe redouble d’efforts pour atteindre ses objectifs. Pour financer ses études, elle enchaîne les petits boulots et travaille dans la restauration, chez McDonald’s ou encore à Disneyland Paris.
Validation scientifique et engagement associatif
Puis un jour tout s’accélère. Après une licence en ingénierie mécanique à l’Université Pierre-et-Marie-Curie de la Sorbonne, à Paris, elle obtient un master en mécanique des fluides, pour lequel elle a passé sa dernière année à étudier l’ingénierie spatiale à l’Université de Tokyo, au Japon. Elle prépare ensuite un doctorat en astronomie à l’Institut de Mécanique Céleste et de Calcul des Éphémérides, et soutient en 2016 sa thèse intitulée «Étude de l’influence des incréments de vitesse impulsionnels sur les trajectoires de débris spatiaux».
Le jeune prodige commence alors à gagner du crédit et trouve enfin le soutien qui avait tardé à venir. Elle décroche ainsi deux bourses de la Fondation Vocation, et de la Fondation Tomato, qui lui permettent de mener à bien ses projets. Parmi eux, le développement de trois associations : «Éphémérides», qui organise des ateliers d’astronomie dans les quartiers populaires, et «Femmes et Sciences», ainsi que «Women in Aerospace», qui militent en faveur des carrières féminines dans l’astronomie.
Pour Fatoumata Kebe, ces associations sont une manière de susciter de nouvelles vocations et d’endiguer les nombreux obstacles et préjugés que peuvent connaître des femmes, en particulier issues des quartiers populaires, qui souhaitent comme elle, se diriger vers des carrières dans l’astronomie. Dans cette optique, elle créé notamment l’événement «W(e) talk» (women empowerment event) qui donne la parole à des femmes venues raconter leur parcours en public pour encourager d’autres femmes à oser exercer le métier dont elles rêvent.
Projet entrepreneurial au Mali
Si les qualités de scientifique de Fatoumata Kebe font désormais l'unanimité, elle choisit par la suite de relever un autre défi, celui de l'entrepreneuriat. En 2018, elle lance son projet «Connected Eco» avec la coopération de femmes au Mali, dont sa famille est originaire, pour optimiser l’usage de l’eau dans l’irrigation. Pour ce faire, l’entreprise fabrique des systèmes d’irrigation connectés pour le secteur agricole, qui fonctionnent grâce à l’énergie solaire. Elle favorise ainsi la préservation de la ressource en eau, et elle permet l’accès à des technologies qui diminuent la charge de travail manuel des exploitants agricoles.
Le projet gagne le prix des jeunes innovateurs de l’Union internationale des télécommunications, et elle est nommée par le magazine Vanity Fair comme l’une des Françaises les plus influentes au monde en 2018. Elle est même nommée chevalier de l’ordre national du Mérite en novembre 2021. Aujourd’hui, Fatoumata Kebe continue d’exercer sa profession et de mener à bien ses nombreux projets, et elle a également écrit deux livres sur un sujet qui lui est cher, la Lune : «La Lune est un roman» (Slatkine, 2019) et «Lettres à la Lune» (Slatkine, 2020).
En voyage aux États-Unis, Fatoumata Kebe viendra apporter son expertise pour discuter des nombreux enjeux scientifiques qui entourent la question de la conquête spatiale. Qu’il s’agisse des satellites, que les Américains Elon Musk et Jeff Bezos prévoient d’envoyer par milliers sur orbite, ou encore de l’exploration spatiale, en passant par les ressources naturelles présentes dans l’espace, où même, qui sait, de la conquête de Mars, nul doute que Fatoumata Kebe aura son mot à dire, et de bons conseils à donner.