Valérie Pécresse éliminée de la présidentielle au premier tour (4,6% des voix), c’est la droite traditionnelle, symbolisée par le parti Les Républicains, qui ne s’est pas qualifiée au second tour du scrutin suprême, pour la deuxième fois consécutive. Pire, ce score extrêmement faible leur fait l'effet d'une claque. De quoi se demander ce qu’il peut advenir de cette famille politique.
Une explosion des Républicains ?
Le très mauvais résultat de cette présidentielle devrait plonger un peu plus Les Républicains dans le marasme. Un scénario possible après ce nouveau revers serait de les voir se désagréger. Une possibilité à prendre avec des pincettes, pointe Bruno Cautrès, politologue au CNRS et au Cevipof de Sciences Po. «En politique, rien ne disparaît ou n'apparaît d'un seul coup. C'est le temps long, il ne faut pas se précipiter en déclarant un acte de décès politique».
Reste que sur leur gauche, la tentation macroniste devrait s’amplifier pour les LR. Edouard Philippe, via son parti Horizons, a pour ambition de récupérer bon nombre de transfuges. Sur leur droite, les défenseurs d’une ligne dure peuvent être attirés par le bloc que tente de constituer Eric Zemmour. Cependant, le score décevant – lui aussi – du leader de Reconquête (7,1%) peut limiter ce risque, selon Bruno Jeanbart, politologue et vice-président d’OpinionWay.
«La tentation pour Les Républicains peut être de laisser passer l'intégralité de la séquence électorale du printemps, pour voir s'ils sont capables de sauver un certain nombre de choses, notamment aux législatives», estime-t-il. «C’est tout à fait possible, comme en 2017 (deuxième force à l’Assemblée nationale derrière LREM)».
Envisager une dislocation des Républicains et la fuite complète de ses cadres paraît donc peu probable à court terme.
Le statu quo ?
Cette faible probabilité de voir Les Républicains voler en éclat dans les prochains mois donne plus de vigueur au scénario d’un statu quo. Les choses pourraient ainsi rester en l’état, malgré les œillades des macronistes ou de la droite dure. «Ils ont le temps d’attendre», assure Bruno Cautrès. Selon lui, ils pourraient même assurer leur avenir s’ils parviennent «à se maintenir à flot aux législatives et qu'Emmanuel Macron a besoin d'eux pour créer une majorité parlementaire». Le parti gagnerait alors en poids politique, sans pour autant se fondre dans LREM.
Le politologue va même jusqu’à envisager une possible réorganisation du parti durant le quinquennat, en vue de 2027. Le nom Les Républicains pourrait ne plus exister, mais les idées et les acteurs seraient toujours présents, regroupés autour d'une nouvelle personne.
Un changement de pouvoir à la tête des LR ?
Les répercussions de la défaite à la présidentielle devraient néanmoins bousculer l’ordre établi au sein des Républicains. L’étiquette de modérée étant collée à Valérie Pécresse, cette ligne pourrait être particulièrement affaiblie dans le parti. D’autant que, dans le même temps, la qualification de Marine Le Pen au second tour et les 2,5 points de plus obtenus par Eric Zemmour montrent que les électeurs sont sensibles à des projets considérés comme «durs» sur certains thèmes.
Symbole de cette ligne au sein de LR, Eric Ciotti ou Laurent Wauquiez pourraient-ils en profiter pour s’installer (ou se réinstaller) à la tête du parti ? «Je ne m'attends pas à ce que cela se produise dès le lendemain de l’élection, avance Bruno Jeanbart. Mais oui, probablement, ceux qui pensent que la droite doit avoir une attitude et des positions plus affirmées sont renforcés par l'échec de Valérie Pécresse». Selon lui, si les choses devaient aller en ce sens, elles se décanteraient plutôt à moyen ou long terme. «Cinq ans (jusqu'à la prochaine présidentielle), c'est très long à tenir quand vous voulez imposer une nouvelle ligne, prévient-il. Il peut donc y avoir la tentation de se dire : 'on le fera tranquillement, en fonction de la manière dont se déroulera le prochain quinquennat'».
«On voit bien qu'il y a des tensions au sein de ce parti politique, abonde Bruno Cautrès. Valérie Pécresse a tenté d'incarner une synthèse mais qu'elle n'y est pas arrivée». Les Républicains ayant en interne des personnalités suffisamment marquantes pour reprendre les rênes (Rachida Dati peut également être citée), le scénario d’un changement de ligne n’est «pas impossible», estime-t-il. «Il faudrait néanmoins avoir une boule de cristal», pour anticiper cela, conclut-il.