Candidat surprise de cette élection présidentielle 2022, Eric Zemmour n’est pas parvenu à maintenir la dynamique qui le portait en début de campagne. Battu avec 7,1% des voix, il doit désormais se tourner vers la suite. Plusieurs scénarios, jamais simples, se trouvent face à lui.
Les législatives dans le viseur, pour s’ancrer en politique
Eric Zemmour avait déjà assuré cette semaine que s’il ne parvenait pas à être élu à l’Elysée (ce qui est donc le cas), il serait candidat aux législatives. Il indiquait même se voir en futur «chef de l’opposition». Une ambition qui doit donc passer par le scrutin du mois de juin. «Cela va être très difficile pour lui», anticipe Bruno Jeanbart, politologue et vice-président d’OpinionWay. «Lorsque vous n’êtes pas parmi les deux premiers d’une présidentielle, il est très compliqué de convertir son attractivité aux législatives».
Ce nouveau rendez-vous «va être tout à fait essentiel», reprend Bruno Cautrès, politologue au CNRS et au Cevipof de Sciences Po. «S’il n'arrive pas à se faire élire député, ça va être difficile pour lui de continuer à expliquer que les Français l'adorent. Mais s’il est à l’Assemblée, ça change tout. Il pourrait même parvenir à constituer un petit groupe, avec des députés LR déçus».
L’avenir politique personnel d’Eric Zemmour devrait donc reposer énormément sur les scrutins des 12 et 19 juin prochain. D’autant qu’il n’est pas seul à avoir le profil pour prendre la tête du camp nationaliste. «Imaginons un scénario où Marion Maréchal est élue députée et pas Eric Zemmour», avance Bruno Cautrès. «Pour lui ce serait une situation assez embêtante». Sans compter sur la présence de Marine Le Pen, même s’il faudra attendre le second tour pour connaître son avenir (élue présidente, retrait de la politique ou poursuite au RN ?). Il faudra aussi compter sur les ambitions de Jordan Bardella, lui aussi bien ancré dans ce courant d’idée, et qui pourrait devenir un sérieux rival.
Une alliance avec le Rassemblement national ?
Face à cet avenir politique pouvant s’avérer compliqué, Eric Zemmour pourrait-il être tenté de nouer des alliances avec le Rassemblement national ? Si cela permettrait de former un pôle identitaire puissant, la chose semble peu probable. Il a cependant appelé à voter pour Marine Le Pen au second tour de l'élection présidentielle. Ne pas le faire aurait été une faute politique, s’accordent les deux spécialistes, mais plus par risque de casser son image anti-Macron (et de décevoir ses électeurs, dont il a besoin pour les législatives) que par réelle volonté de rapprochement.
L’union des droites, une possibilité ?
Cherchant toujours à créer autour de lui une «union des droites», allant de la frange dure des Républicains au Rassemblement national, Eric Zemmour devrait poursuivre ses efforts après la présidentielle. S’il est possible que certains membres des LR puissent le rejoindre, surtout avec le score très faible de Valérie Pécresse (4,6%), la qualification de Marine Le Pen au second tour rend peu envisageable la fuite des cadres RN avant les législatives. «A court terme, je n’envisage pas cette union des droites», résume ainsi Bruno Jeanbart. «En revanche, je ne dis pas que ça ne peut pas se produire au cours du prochain quinquennat».
Bruno Cautrès va plus loin, en pointant «des obstacles majeurs» qui pourrait rendent la chose, telle qu’elle est imaginée par le leader de Reconquête, hypothétique : «sociologiquement, les droites Pécresse, Le Pen ou Zemmour sont diversifiées. Au RN l'électorat est populaire. Il y a un gouffre avec celui des Républicains ou d'Eric Zemmour». Difficile, dans ce contexte, de l’imaginer s’imposer à court terme à la tête d’une nouvelle force politique regroupant ces trois courants.