L’ancienne garde des Sceaux de François Hollande est candidate à la présidence de la République. Une deuxième expérience du genre pour Christiane Taubira, qui tient depuis quelques années une place importante dans le paysage politique français.
Une militante indépendantiste durant sa jeunesse
Bien avant de devenir députée européenne ou ministre de la Justice, Christiane Taubira a été militante en faveur de l’indépendance de la Guyane. Née dans ce département d'outre-mer en février 1952, Christiane Taubira fait partie d'une fratrie de onze enfants que sa mère élève seule. Le choix de l'indépendantisme, Christiane Taubira l'expliquera quelques années plus tard estimant que le département français situé dans la région Amazonienne était alors une société très stratifiée où les rapports coloniaux étaient encore très présents.
Selon la candidate à la présidentielle, dans les années 1970, époque durant laquelle elle militait, de nombreuses lois de la République ne sont pas appliquées en Guyane. En 2019, lors de la promotion de son livre Nuit d’épine, elle confie dans une interview à Konbini : «La liberté, l’égalité, la fraternité, prendre ça au sérieux, c’est ça qui m’a conduit à être indépendantiste et c’est ça qui fait qu’aujourd’hui encore, la tête sur le billot, je ne vais pas renier cet engagement indépendantiste.»
Au début des années 1980, avec l'élection de François Mitterrand, Christiane Taubira cesse le militantisme indépendantisme, ce dernier n'étant plus soutenu par les Guyanais. Dix ans plus tard, en 1992, elle cofondera le parti Walwari avec son mari Roland Delannon. Ensemble ils auront quatre enfants avant de se séparer en 2002. Une séparation sur fond de crise politique, Roland Delannon ayant présenté une liste concurrente à celle de Christiane Taubira aux élections régionales de 1998.
À l’origine de la loi reconnaissant la traite et l’esclavage comme crime contre l’humanité
Devenue députée de la première circonscription de Guyane en 1993, Christiane Taubira porte en 2001, la loi tendant à la reconnaissance de la traite et de l’esclavage en tant que crime contre l’humanité et dite loi Taubira. La députée est alors rapporteuse du texte, promulgué le 21 mai 2001.
Il fait alors partie des quatre lois mémorielles françaises et reconnaît comme crime contre l’humanité les traites et l’esclavage pratiqués à partir du XVe siècle sur les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes, mais ne prend pas en compte les traites orientale, barbaresque et intra-africaine.
Il s’agit là d’un des grands accomplissements politiques de Christiane Taubira.
La première femme noire candidate à l’élection présidentielle française
En 2002, Christiane Taubira est investie candidate par le Parti radical de gauche (PRG) pour l’élection présidentielle de la même année, devenant ainsi la première femme noire à se présenter à la mandature présidentielle. Une première qui ne lui sera pas profitable puisqu'elle arrivera en treizième position de cette élection aux multiples candidatures.
Le score de Christiane Taubira lors de cette élection historique créera même une forte polémique à gauche. Avec 2,32% des voix au premier tour, la candidate du PRG est accusée d’avoir fait chuter Lionel Jospin, candidat du Parti socialiste, et favorisé le passage au second tour du candidat du Front national, Jean-Marie Le Pen.
Jean-Marie Le Pen est en effet arrivé en seconde position avec 16,86% des voix, au coude à coude avec Lionel Jospin (16,18%). Une différence qui aurait certainement été gommée sans la multiplication des candidatures à gauche, et notamment celle de Christiane Taubira.
engagée pour la loi du mariage pour tous
En janvier 2013, alors ministre de la Justice et garde des Sceaux sous le mandat de François Hollande, Christiane Taubira porte le projet de loi visant à ouvrir le mariage aux couples homosexuels. Ce projet de loi dit du mariage pour tous est qualifié par la ministre comme étant une «réforme de la civilisation». Dans son discours introductif du projet, elle site alors le doyen Carbonnier qui définissait le mariage civil comme «la gloire cachée de la République», faisant ainsi «allusion aux vifs débats qui ont accompagné l'instauration de ce mariage civil» et qui diviseront à nouveau les Français pendant de longs mois.
La loi sera finalement adoptée le 23 avril 2013 par l’Assemblée nationale, avec 331 voix contre 225 et 10 abstentions.
La rupture ministérielle avec la déchéance de nationalité
Le 27 janvier 2016, après trois années au poste de ministre de la Justice, Christiane Taubira annonce qu’elle quitte le gouvernement. La raison invoquée : «un désaccord politique majeur». Fortement opposée à l’inscription de la déchéance de nationalité à la Constitution, Christiane Taubira a remis sa démission à François Hollande, quelques heures avant que le Premier ministre Manuel Valls ne présente aux députés la dernière version du texte sur la déchéance de nationalité.
L’ancienne ministre avait alors tweeté : «Parfois résister c'est rester, parfois résister c'est partir. Par fidélité à soi, à nous. Pour le dernier mot à l'éthique et au droit.» Christiane Taubira marquera les esprits en quittant son ministère sur son vélo jaune.