Des chercheurs français tentent actuellement de mettre au point un vaccin contre le Covid-19 administré non pas par voie intramusculaire, mais par voie nasale, afin de conférer aux patients une «immunité muqueuse» ? Mais de quoi s’agit-il exactement ?
L'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) et l'université de Tours ont en effet déposé cette semaine le brevet d'un candidat vaccin par spray nasal.
Techniquement, précisent les institutions, il sera administrable «à l'aide d'un petit adaptateur placé au bout d'une seringue sans aiguille permettant une diffusion au sein de la cavité nasale».
des anticorps IgA
Ce sérum sans adjuvant, dont les tests pré-cliniques ont montré des résultats très positifs sur les animaux (des souris et des hamsters), va entraîner une immunité muqueuse, «c’est-à-dire une réponse immunitaire locale, ici, au niveau du nez, qui est la porte d'entrée du SARS-CoV-2», explique auprès de CNEWS Mathieu Epardaud, membre de l'équipe de recherche.
Dans le détail, cette immunité est induite via «des anticorps appelés IgA (immunoglobulines A)». Et ces derniers «ont des capacités plus polyvalentes que les IgG (immunoglobuline G), des anticorps que l’on retrouve dans le reste de l’organisme», développe le spécialiste, qui travaille au sein de l'Unité mixte de recherche Infectiologie et santé publique (UMR ISP), une structure conjointe entre INRAE et l'Université de Tours.
empêcher le virus de se multiplier
«On peut imaginer que si les IgA sont dirigés vers la protéine Spike (la clé qui permet au SARS-CoV-2 de pénétrer dans nos cellules, NDLR), et que celle-ci change, le sérum va garder la majorité de son efficacité pour neutraliser le virus».
Mais pour activer ce système immunitaire particulier, «le seul moyen est de vacciner directement au niveau de la muqueuse». En sachant qu’en faisant cela, ajoute-t-il, «on va également mobiliser le système immunitaire général».
En clair, si l'immunité muqueuse est activée, «lorsque le virus arrive, nos cellules sont prêtes pour le bloquer dès son entrée dans l’organisme, et ainsi l’empêcher de se multiplier et de coloniser les poumons».
couper la transmission de la maladie
Mais ce n'est pas la seule plus-value de ce produit. Contrairement aux injections traditionnelles et actuelles, qui protègent contre les formes graves, mais n’empêchent pas totalement la contagiosité, ce vaccin est d'autre part censé couper la transmission de la maladie entre personnes.
«L’individu serait protégé et ne serait plus contagieux car il n’a pas le temps de devenir un petit incubateur pour le virus», souligne Mathieu Epardaud.
L'équipe de recherche espère démarrer dès cet automne la phase de production en vue d'une phase clinique lors du deuxième semestre 2022. Destiné aux personnes non vaccinées, ce sérum nasal, dont la mise sur le marché est prévue pour 2023, pourrait également servir de rappel pour la population déjà vaccinée.