Lorsqu'un témoignage faisant état de violences sexuelles sur mineur est recueilli, une enquête doit «systématiquement» être ouverte. C'est la consigne transmise aux procureurs par le biais d'une note du garde des Sceaux, Eric Dupond-Moretti. Le document précise que la règle reste valable si les faits sont susceptibles d'être prescrits.
Cette nouvelle directive intervient alors que les témoignages sur l'inceste se sont multipliés ces dernières semaines, notamment après la publication de «La Familia grande», le livre de Camille Kouchner, dans lequel l'auteure accuse son beau-père, Olivier Duhamel.
«Si certains de ces témoignages sont particulièrement médiatisés, ils ne doivent pas nous conduire à oublier que la réalité est composée de multiples autres victimes, qui n'accèdent pas à ces relais de communication mais pour lesquelles la souffrance est identique», écrit le ministre de la Justice dans cette note aux magistrats.
Pour Eric Dupond-Moretti, l'ouverture systématique d'une enquête préliminaire dans ce type d'affaires doit permettre dans un premier temps de «vérifier si, au regard de la date des faits dénoncés, ceux-ci, à les supposer constitués, seraient prescrits».
Et même si c'est le cas, la démarche n'est pas vaine car «la réalisation d'investigations dans l'environnement de la personne mise en cause» offre la possibilité, le cas échéant, «de découvrir l'existence d'autres victimes pour lesquelles les faits ne seraient pas prescrits, voire pour lesquelles seule l'enquête serait de nature à révéler des faits dont elle continueraient à souffrir».
Par ailleurs, avec une enquête en bonne et due forme, la personne mise en cause a l'occasion «de s'expliquer sur les accusations portées à son encontre», dans un cadre qui «garantit le respect de la présomption d'innocence dont elle bénéficie».
Si les faits se révèlent effectivement prescrits, le garde des Sceaux demande à ce que les victimes en soient informées à l'issue de l'enquête, afin qu'elles puissent comprendre pourquoi cette dernière est classée. Selon les consignes d'Eric Dupond-Moretti, les parquets devront également préciser si, malgré la prescription, les faits dénoncés constituaient bien une infraction ou non. Dans ce dernier cas, rendre les motifs du classement publics permettra de «mettre un terme à la propagation d'informations calomnieuses».