Six ONG ont décidé ce 27 janvier de lancer pour la première fois une action commune contre l'Etat. L'objectif est de forcer le gouvernement à mettre fin aux «contrôles d'identité discriminatoires» effectués par la police.
Pour ce faire, les ONG ont mis en demeure le premier ministre Jean Castex, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin et le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti. Ceux-ci ont quatre mois pour apporter des «réponses satisfaisantes au problème». Sinon, les ONG se réservent le droit de saisir la justice.
Les six organisations espèrent ainsi en finir avec le contrôle au faciès, qui consiste à contrôler l'identité de quelqu'un en fonction de son apparence. Emmanuel Macron avait d'ailleurs reconnu l'existence de cette pratique lors d'une interview accordée à Brut en décembre : «Aujourd'hui, quand on a une couleur de peau qui n'est pas blanche, on est beaucoup plus contrôlé (...) On est identifié comme un facteur de problème et c'est insoutenable».
Les ONG ont formulé plusieurs demandes pour venir à bout du problème. D'abord, «la modification du Code de procédure pénale pour interdire explicitement la discrimination dans les contrôles d'identité (...) afin qu'ils ne puissent être fondés que sur un soupçon objectif». Elles réclament aussi l'adoption d'un règlement spécifique aux contrôles des mineurs, et la création d'un système d'enregistrement des données relatives aux contrôles d'identité.
L'Etat déjà condamné en 2016
Mais ces six ONG - à savoir Amnesty International, Human Rights Watch, Open Society Justice Initiative, la Maison communautaire pour un développement solidaire, Pazapas et Réseau Egalité Antidiscrimination Justice interdisciplinaire - ne sont pas les seules à regretter l'inaction du gouvernement sur ce sujet.
En novembre 2016, la cour de Cassation avait déjà condamné l'Etat pour des contrôles d'identité au faciès. Mais la situation ne s'est pas améliorée. En 2017, une enquête du Défenseur des Droits montrait que 40% des jeunes de 18 à 24 ans avaient été contrôlés au moins une fois lors des cinq dernières années. Pour les «jeunes hommes du même âge perçus comme noirs ou arabes», ce taux s'élève à 80%.
Des chiffres explosifs, alors que les violences policières sont au coeur du débat public. Le gouvernement a d'ailleurs lancé ce 25 janvier un «Beauvau de la Sécurité» : une grande concertation dédiée à la police et aux gendarmes. Nul doute que le contrôle au faciès sera sur la table.