Il doit être le grand rendez-vous dédié aux policiers et aux gendarmes. Le «Beauvau de la sécurité», annoncé par Emmanuel Macron dans un contexte tendu, s'ouvre aujourd'hui. Une grande consultation de quatre mois, qui devrait aboutir sur une «grande loi» d'orientation de programmation de la sécurité intérieure (Lopsi), avant l'élection présidentielle de 2022.
Mais qu'attendent les syndicats, premiers concernés par ces mesures, de ce grand rendez-vous dont le coup d'envoi sera donné par le Premier ministre Jean Castex ? «Le but n’est pas de critiquer avant même que cela ait commencé, mais on espère que ce ne sera pas des réunions pour dire que l’on fait des réunions. On veut que ça bouge», prévient à CNEWS Oliver Hourcau, secrétaire général adjoint d’Alliance. «Il faut du concret», abonde Denis Jacob, secrétaire général d’Alternative Police-CFDT. «Les collègues n’ont pas une réelle attente du Beauvau. Ils sont désabusés. Cela fait des années que l’on parle de leurs problèmes, mais rien ne change. Ils attendent de voir enfin des effets sur le terrain.»
Car c’est bel et bien ce qu’il se passe dans les commissariats et lors des patrouilles et interventions qui touche en premier lieu le quotidien des policiers. Alliance espère ainsi que les débats permettront de faire comprendre l’importance de les délester des «tâches périphériques», comme les gardes et extractions de détenus, ou encore les protections de bâtiments, qui demandent de mobiliser énormément de temps et d’effectifs et empêchent les agents de se focaliser sur le cœur de métier.
L'image de la police à défendre
Si le Beauvau de la sécurité doit trouver des solutions aux problèmes de formation, d’encadrement ou encore de moyens humains et matériels, les syndicats attendent aussi avec impatience les discussions autour du lien police/population. Face aux nombreuses accusations de violences ou de racisme auxquelles les forces de l’ordre font face, ils estiment qu’il est temps de rétablir les vérités et d’arrêter de stigmatiser l’uniforme.
«Les policiers et les gendarmes ont le sentiment d’être lâchés par tout le monde», se désole Denis Jacob. «Des personnalités politiques comme à La France insoumise et d’autres du "showbiz" comme Camelia Jordana ou Omar Sy jettent en pâture ces hommes», poursuit Olivier Hourcau. «Ils contribuent au malaise qu’ils ressentent». Et de pointer les conséquences graves qu’ont ces discours sur le quotidien des agents. «Il n’y a plus aucun respect de l’autorité. Le Beauvau devra aussi répondre à ça, pour que les policiers travaillent dans de bonnes conditions de sérénité et de sécurité», reprend le dirigeant d’Alternative Police, citant les nombreux exemples où des automobilistes n’hésitent plus à les renverser pour ne pas se faire contrôler.
Le besoin d'une meilleure réponse pénale
Les syndicats se félicitent en revanche d’une avancée déjà obtenue, mais que les débats devront affiner : la création d’un «observatoire de la réponse pénale», qui doit être mis en place le 1er juillet prochain. Il s’agira ainsi d’aborder le problème des écarts entre les peines encourues par un délinquant et celles réellement prononcées, ainsi que celles vraiment effectuées. Les policiers attendent aussi l’instauration d’une peine minimale lorsqu’ils sont agressés.
Enfin, parmi la myriade de sujets qui devraient être abordés durant ces quatre mois, la refonte en profondeur de l’organisation et de la structuration de la police aura également son importance. Avec, là encore, le besoin de sentir l’engagement du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin et du président Emmanuel Macron, dont les propos sur le contrôle au faciès ont laissé un vilain arrière-goût dans la bouche des policiers.