La cour d'assises spéciale de Paris a prononcé mercredi des peines allant de quatre ans d'emprisonnement à la réclusion criminelle à perpétuité à l'encontre des accusés reconnus coupables pour leur rôle dans la préparation des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher.
Mohamed Belhoucine, présumé mort en Syrie et qui était jugé par défaut, a été condamné à la plus lourde peine, soit la perpétuité. L'ex-compagne de Coulibaly Hayat Boumeddiene, en fuite en Syrie, et Ali Riza Polat, présenté comme le "bras droit" du tueur de l'Hyper Cacher, ont pour leur part écopé de 30 ans de réclusion.
Parmi les accusés, Nezar Mickaël avait notamment confié à la cour n’avoir «jamais eu aussi peur de (s)a vie de la justice de (s)on pays». Il fait partie des quatorze accusés, onze étaient présents et trois sont jugés par défaut, dont la compagne en fuite d'Amédy Coulibaly, Hayat Boumeddiene.
Pendant cinq jours, la défense s'est élevée contre le risque d'une «exemplarité» pour pallier l'absence des frères Saïd et Chérif Kouachi et Amédy Coulibaly, abattus par les forces de l’ordre après leurs attaques qui ont fait 17 morts pendant trois jours en janvier 2015 dans la capitale française.
Mardi dernier, le parquet national antiterroriste avait requis de lourdes peines, de cinq ans d'emprisonnement à la réclusion criminelle à perpétuité, contre les quatorze accusés soupçonnés de soutien logistique aux auteurs des attentats contre Charlie Hebdo et l'Hyper Cacher et pour deux d'entre eux de «complicité».
Des «peines de malades»
Le principale accusé, Ali Riza Polat, s’était défendu d’avoir joué un rôle lors des attaques : «J'ai vraiment pas fait tout ce que vous dites». La réclusion à perpétuité avait été requise contre celui qui est accusé d'être le complice des frères Kouachi et de Coulibaly. Il aura marqué les trois mois d'audience par ses invectives et ses coups de colère.
Ses coaccusés s'étaient défendus d'être des «terroristes» et nié tout «lien» avec les attaques. Selon les avocats généraux, ils étaient la «cheville ouvrière» et la «base arrière» des attentats. Sans eux, le «trio» formé par les frères Kouachi et Coulibaly «n'était rien», avaient appuyé les magistrats.
En réponse aux «peines de malades» requises -selon les mots d'une avocate-, la défense avait dénoncé un dossier «friable» et «vide» de preuves, et s'était engouffrée dans les zones d'ombre de l'instruction.
Ces zones d'ombre ont été «assumées» par le parquet, qui en avait rejeté la faute sur l'attitude et les déclarations contradictoires des accusés, pour la plupart jugés pour avoir recherché ou fourni des armes au trio jihadiste. La façon dont cet arsenal avait transité puis atterri entre les mains des terroristes reste peu claire et les longs débats n'auront pas permis d'obtenir toutes les réponses.
Les enquêteurs avaient identifié deux «filières» d'acheminement des armes retrouvées en possession de Coulibaly : l'une «belgo-ardennaise», l'autre «lilloise».
Plusieurs déplacements entre Paris, Lille et la Belgique ont ainsi été mis au jour à l'aide de la téléphonie, clé de voûte de l'accusation. Quelques traces ADN ont également été découvertes, notamment sur deux armes d'Amedy Coulibaly, celles de son ancien codétenu Nezar Mickaël Pastor Alwatik.
«Ce n'est pas le procès des auteurs des attentats»
Plaidant lundi, les avocats de ce dernier avaient tancé des accusations reposant sur des «hypothèses». Après les débats, «le flou et le doute persistent et on ne peut pas être condamné sur du flou, des doutes et des supputations», avait fait valoir Delphine Malapert.
Quelque 200 personnes s'étaient constituées parties civiles au procès, intégralement filmé pour les archives historiques, une première en matière de terrorisme.