Les syndicats favorables au régime universel de retraite à points (CFDT, CFTC, Unsa) réclament à l'exécutif pour sortir du conflit le retrait de l'«âge d'équilibre», mais aussi des améliorations sur la pénibilité, le minimum de pension ou les mesures pour les fonctionnaires.
Matignon s'est dit prêt jeudi soir à dialoguer avec les partenaires sociaux sur ces points «pour améliorer le projet» en les conviant à des réunions «le plus tôt possible» la semaine prochaine.
Retrait de la mesure d'«âge d'équilibre»
C'est la «ligne rouge» de ces syndicats, et notamment du secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, qui avait prévenu à l'avance l'exécutif.
Pour assurer le retour à l'équilibre du système, Édouard Philippe a annoncé l'instauration progressive, à partir de 2022, d'un «âge d'équilibre» qui atteindra 64 ans en 2027, avec un bonus/malus s'appliquant de manière viagère sur la pension. Il ne laissait aux partenaires sociaux que le soin de définir les modalités du cheminement vers les 64 ans.
Pour les trois syndicats, c'est une «mesure d'économies de court terme» qui «va forcer les salariés à travailler plus longtemps» et va «pénaliser d'abord ceux qui ont commencé à travailler jeunes».
Pour la CFTC, «fixer dès aujourd'hui cet âge-cible et le calendrier pour l'atteindre augure mal du rôle attribué aux partenaires sociaux».
Une pénibilité plus large
Le gouvernement veut ouvrir aux fonctionnaires et aux salariés des régimes spéciaux le compte professionnel de prévention (C2P), qui permet à certains salariés du privé de partir dès 60 ans pour compenser des conditions de travail difficiles (bruit, température, travail de nuit...).
Il a suggéré également d'assouplir les critères pour la prise en compte du travail de nuit, ce qui bénéficiera notamment aux infirmiers et aides-soignants à l'hôpital.
La CFDT, à l'origine de ce dispositif, juge cette réponse «pas à la hauteur alors qu'elle est une condition de la justice sociale». Elle plaide notamment pour le rétablissement des quatre facteurs de pénibilité (postures pénibles; manutentions manuelles de charges; vibrations mécaniques; agents chimiques dangereux) supprimés (sur dix) par le gouvernement en 2017.
Un minimum de pension supérieur à 85% du Smic
Le gouvernement propose qu'une personne ayant fait toute sa carrière au Smic (1.204 euros net actuellement) perçoive au moins 1.000 euros net de retraite en 2022, puis 85% du Smic à partir de 2025. Cette mesure s'applique aussi aux travailleurs indépendants et aux agriculteurs.
La CFDT juge qu'«une carrière complète au Smic mérite» une pension «égale à 100% du Smic».
Fonctionnaires, régimes spéciaux: des engagements plus précis
C'est davantage l'Unsa, particulièrement présente chez les fonctionnaires, à la RATP et à la SNCF, qui est en première ligne.
Pour son secrétaire général, Laurent Escure, «les personnels de santé publique, les forces de l'ordre et les pompiers, les agents territoriaux, les fonctionnaires ayant peu ou pas de primes (dont les enseignants), les salariés de la SNCF, de la RATP, restent sur leur faim car aucune garantie ne leur a été concrètement apportée. Il ne suffit pas de dire que des discussions vont commencer, il faut préciser quand, à quel rythme et pour aller dans quelle direction».
Le gouvernement propose de garantir dans la loi aux enseignants que leurs pensions ne baisseront pas et que la revalorisation de leurs primes soit engagée à partir de 2021, en priorité sur les débuts de carrière.
A la SNCF, l'Unsa et la CFDT souhaitent que la réforme ne s'applique qu'après la fin des embauches au statut au 1er janvier 2020. A la RATP, ce serait après l'adoption de la réforme pour l'Unsa («clause du grand-père»).
Le gouvernement souhaite que la réforme concerne la génération 1985 pour les conducteurs et 1980 pour les agents de maintenance. Et il a demandé à la direction des deux entreprises d'enclencher une concertation avec les syndicats sur les modalités.