Le Conseil de l'Europe a retiré sa campagne controversée célébrant «la liberté dans le hijab». Le port de ce vêtement religieux a suscité à plusieurs reprises de vifs débats en France. Comment faire la différence entre le hijab et les autres voiles ? Quelles tenues sont prohibées, et dans quel espace ? Tour d'horizon de ce qu'autorisent les textes de loi.
Hijab, niqab, burqa... Les termes relevant du vêtement islamique sont légion, et chacun désigne une tenue précise. Le hijab, célébré dans une vidéo réalisée par le Conseil de l'Europe, correspond au voile «générique». On l'emploie pour parler du voile islamique le plus répandu, celui qui couvre tête et cheveux mais pas le visage.
Le niqab, lui, est un voile masquant l'intégralité du corps, visage inclus à l'exception des yeux. Son port est plutôt le fait de pratiquants d'un islam rigoriste, notamment des adeptes du salafisme.
Enfin, la burqa, née en Afghanistan, consiste en un voile couvrant l'intégralité du corps de la femme, y compris le visage. Seul un voile ou une grille de tissu, disposés au niveau des yeux, permettent de voir. Ce sont les talibans, fondamentalistes islamistes, qui ont imposé la burqa lors de leur arrivée au pouvoir dans le pays, à la fin des années 1990.
Le voile intégral, interdit dans tout l'espace public
Le voile intégral, qui inclut la burqa et le niqab, est interdit des lieux publics dans l'Hexagone depuis la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public. Sont ainsi concernés la rue, les transports en commun, les commerces, les hôpitaux, les administrations ou encore les cinémas.
Aucune référence à l'islam n'est néanmoins mentionnée dans le texte de loi. Celui-ci dispose que «nul ne peut, dans l'espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage», en ce sens que ces pratiques «peuvent constituer un danger pour la sécurité publique et méconnaissent les exigences minimales de la vie en société».
Validée par le Conseil constitutionnel en 2010, puis par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) en 2014, la loi prévoit jusqu'à 150 euros d'amende en cas d'impair. En l'espace de cinq ans, plus de 1.500 verbalisations ont ainsi eu lieu.
Le voile partiel, interdit dans les établissements scolaires sauf universités
Le hijab, tout comme le tchador iranien, est autorisé en France dans tout l'espace public, à l'exception des écoles, collèges et lycées publics, et ce depuis la loi du 15 mars 2004 qui interdit le port de signes religieux jugés «ostensibles» dans les établissements scolaires. Le texte de loi proscrit également le port de la kippa, de grandes croix chrétiennes ou encore du dastar, turban porté par la communauté sikh. L'université n'est pas concernée par l'interdiction.
Et dans les crèches ? A la suite de la célèbre affaire Baby Loup, la justice française avait validé en juin 2014 le licenciement pour «faute grave» d'une femme voilée employée dans une crèche privée. Dans la foulée de cette jurisprudence, les parlementaires ont voté en mai 2015 une loi sur le principe de «neutralité religieuse» dans les établissements accueillant des enfants de moins de six ans.
Le port du voile sur le lieu de travail : au cas-par-cas
Si, d'après la loi, les agents de la fonction publique sont tenus de respecter une «stricte neutralité», la question du port du voile dans les entreprises privées n'est pas définitivement tranchée sur le plan juridique. C'est donc l'approche au cas-par-cas qui prévaut.
Rien n'interdit le voile, en principe, au nom de la liberté religieuse. Mais certains employeurs y sont opposés, estimant que cela nuit à leur activité commerciale. Dans une entreprise, «une clause du règlement intérieur peut interdire à un salarié en contact avec la clientèle le port de tout signe manifestant des convictions personnelles», précise service-public.fr, le site de l’administration française.
Un employeur peut également interdire certaines tenues ou accessoires pour des raisons de sécurité ou d'hygiène sanitaire. Les hautes différentes juridictions françaises (Cour de cassation, Conseil d'Etat) et européennes (CJUE, CEDH) sont régulièrement amenées à statuer au cas-par-cas.
Le burkini, des interdictions suspendues par la justice
Cannes, Nice, Villeneuve-Loubet, La Ciotat, Le Touquet ou encore Saint-Laurent-du-Var. A l'été 2017, treize communes ont pris des arrêtés prohibant le port du burkini sur leurs plages. Là encore, nulle mention du mot «burkini» ou référence à l'islam : les municipalités interdisent l'accès aux plages publiques «à toute personne n'ayant pas une tenue correcte, respectueuse des bonnes mœurs et de la laïcité et respectant les règles d'hygiène et de sécurité des baignades». Une mesure qui laisse donc une grande marge d'appréciation aux forces de l'ordre...
Les mairies, assaillies par les critiques, se défendent en invoquant notamment le contexte d'état d'urgence, qui selon elles légitimerait l'interdiction du burkini, «tenue de plage manifestant une appartenance religieuse» et «de nature à créer des risques de troubles à l'ordre public», selon les arrêts. Contrairement au voile, aucune loi ne restreint le port du burkini, qui demeure rarissime sur les côtes françaises. C'est pourquoi la justice a suspendu la plupart des arrêtés «anti-burkini».