L'Assemblée doit adopter ce mardi 26 mars le projet de loi Santé. Des études de médecine à l'organisation de l'offre de soins, le texte, porté par la ministre Agnès Buzyn, vise à remettre sur pied un système à bout de souffle.
Concrètement, le projet de loi doit traduire une partie des mesures qui avaient été présentées, en septembre dernier, par Emmanuel Macron.
Dans le cadre de la grande réforme voulue par le chef de l'Etat, selon laquelle chaque Français doit pouvoir trouver un médecin et une offre de santé de proximité adaptée à ses besoins, plusieurs changements doivent ainsi intervenir tant au niveau de la formation des futurs médecins, qu'au niveau même des structures de soins.
La suppression du numerus clausus
C'est sans doute la mesure-phare du texte. Jugé «inefficace et injuste» par Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle de 2017, le «numerus clausus» sera supprimé, dès la rentrée 2020.
Cette expression, qui en latin signifie «nombre fermé», provient d'une loi de 1979 visant à encadrer les études médicales françaises.
Chaque année, un arrêté ministériel fixe ainsi le nombre d'étudiants pouvant être admis en deuxième année de médecine, mais aussi d'odontologie, de pharmacie ou de sages-femmes.
En limitant le nombre d'étudiants en deuxième année, il était ainsi assuré que chacun ait un stage dans un hôpital.
Concernant les seuls étudiants en médecine, en juin 2018, 8 205 étudiants ont été admis sur près de 60 000 candidats. Soit à peine 15 % d'heureux élus pour des dizaines de milliers d'étudiants amenés à se réorienter.
Un scénario qui se répète année après année et «un gâchis» pour Agnès Buzyn qui, ce mardi 5 février, a indiqué vouloir augmenter de 20 % le nombre de médecins formés.
Reste qu'en parallèle de son projet de loi, le gouvernement doit encore préciser comment seront sélectionnés les futurs soignants.
Lundi, la ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, a précisé «qu'il y aura toujours une forme de sélection à la fin de la première année», ajoutant que «les critères de cette sélection seront précisés lors de concertations», aujourd'hui en cours.
Plus largement, le gouvernement souhaite également «diversifier les profils» des futurs docteurs en favorisant les passerelles entre cursus universitaires.
«Les futurs professionnels ne connaissent pas ou peu la spécialité étudiée par leurs collègues et nous allons y remédier», déclarait ainsi Agnès Buzyn à CNEWS en septembre dernier.
L’OFFRE DE TÉLÉMÉDECINE ÉLARGIE AU DOMAINE PARAMÉDICAL
La télémédecine, qui consiste à consulter un médecin en visioconférence depuis un ordinateur ou un smartphone, va avoir son équivalent chez les pharmaciens et les auxiliaires médicaux.
Le projet de loi introduit en effet une nouvelle notion, celle de «télésoin». Concrètement, parmi les exemples possibles, les personnes souffrant d’effets secondaires à la suite de traitements lourds, comme les chimiothérapies, pourront être mieux accompagnées par un infirmier sans avoir à se déplacer.
Une pratique qui pourrait également s’étendre aux personnes nécessitant des consultations d’orthophonie et d’orthoptie. Mais si les téléconsultations avec les médecins sont, elles, désormais remboursées, les conditions de prise en charge des actes de télésoin doivent encore être fixées par décret.
Des hôpitaux mieux structurés et des urgences à desengorger
Une fois formés, ces futurs médecins exerceront dans des structures revues et corrigées.
Avec son projet de loi, le gouvernement souhaite en effet répartir les activités entre trois types d'hôpitaux, en révisant ce qu'on appelle la carte hospitalière.
Entre 500 et 600 petits hôpitaux (sur les quelque 1 000 que compte le pays) sont amenés à devenir des hôpitaux de proximité. Leur activité : de la médecine générale, de la gériatrie ou des suivis de soin essentiellement. Le gouvernement veut en labelliser 500 à 600 à l'horizon 2022.
A ces structures, viendront s'ajouter des hôpitaux chargés des soins spécialisés comme la chirurgie ou les services de maternité, lorsqu'une troisième catégorie concernera des soins ultra-spécialisés dans des plateaux techniques de pointe.
Des hôpitaux qui seront également complétés par environ 1 000 communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Elles devraient aussi aider à désengorger les urgences en permettant aux patients de trouver un médecin en urgence de 8h à 20h.
Mais cette nouvelle organisation entraînera la fermeture de certaines activités et de services par endroits. Ce qui inquiète beaucoup les soignants qui ne savent pas où et quand auront lieu ces fermetures et dans quelles conditions. Cela sera précisé par ordonnances, dans un délai de 18 mois après la publication de la loi.
Un métier d’assistant médical imaginé pour libérer du temps
Le gouvernement entend créer 4 000 postes d’assistants médicaux d’ici à 2022.
Ce nouveau métier, qui nécessitera une formation d’un an, contre trois pour les infirmiers, consistera à exécuter des tâches «simples», comme peser les patients ou prendre la tension.
Mais si l’Etat s’est engagé à prendre en charge une partie du salaire, ce volet fait toujours l’objet d’âpres négociations avec l’assurance maladie et les syndicats de médecins.
Le premier d’entre eux, MG France, souhaite notamment que les assistants médicaux soient accesibles à «tous les généralistes y compris ceux qui exercent seuls».
LES MÉDECINS DIPLÔMÉS AILLEURS QU’EN EUROPE MIEUX INTÉGRÉS
Le projet de loi doit en outre introduire plusieurs mesures pour les médecins, pharmaciens, dentistes ou sages-femmes diplômés hors de l’Union européenne qui exercent en France.
Aujourd’hui au nombre de 4 000, ils sont souvent faiblement rémunérés et sans perspectives d’évolution alors qu’ils sont indispensables au bon fonctionnement des services.
Selon les premiers éléments, les effectifs déjà en place pourraient être pérennisés en faisant valoir leur expérience devant des commissions.
Surtout, le nombre de postes ouverts via la «liste A», un concours accessible aux médecins du monde entier, devrait être augmenté en étant calculé au plus proche des besoins.