Jawad Bendaoud sera-t-il à nouveau relaxé ? Son procès en appel, pour avoir logé deux jihadistes du 13 Novembre, dont l'un des cerveaux présumés des attaques qui avaient fait 130 morts à Paris et Saint-Denis, a démarré mercredi devant la cour d'appel de Paris.
Jogging noir à paillettes dorées, bling bling à souhait : Jawad Bendaoud n'a pas misé sur la discrétion pour son grand retour au palais de justice de Paris. Relaxé en première instance, il comparait libre, contrairement au procès qui s'est tenu en janvier et février. Âgé de 32 ans, il est rejugé pour «recel de malfaiteurs terroristes», pour avoir fourni l'appartement où Abdelhamid Abaaoud et Chakib Akrouh s'étaient repliés, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). C'est là que les deux jihadistes, et la cousine du premier, Hasna Aït Boulahcen, sont morts le 18 novembre dans l'assaut des policiers du Raid.
Une attitude différente
En février, à l'issue d'un procès retentissant, le premier en lien avec les attentats du 13 novembre 2015, Jawad Bendaoud avait été relaxé. Le tribunal correctionnel avait jugé qu'il n'était «pas prouvé» qu'il avait «fourni un hébergement à deux individus qu'il savait être des terroristes du 13 Novembre, afin de les soustraire aux recherches et éviter ainsi leur arrestation». Mais le parquet avait aussitôt fait un appel général du jugement.
Si sa relaxe est confirmée, Jawad Bendaoud sera en mesure de demander une indemnisation pour sa détention provisoire de 27 mois à l'isolement. Appel des prévenus, appel des nombreux avocats de la partie civile, rappel des faits : l'audience de mercredi matin a permis d'introduire le procès qui se déroulera jusqu'au 21 décembre. Jawad Bendaoud, dont les fantasques déclarations avaient fait fureur sur les réseaux sociaux lors du premier procès, est resté calme. Il a tout de même haussé la voix quand l'avocate générale a expliqué qu'elle voulait voir sa mère témoigner. «Elle est au Maroc !», lui a-t-il lancé, sur un ton assez agressif.
Le parquet général s'est désisté de son appel concernant Mohamed Soumah, qui avait eu le rôle d'intermédiaire entre Hasna Aït Boulahcen, chargée de trouver une planque pour Abdelhamid Abaaoud, et Jawad Bendaoud. Sa condamnation pénale à 5 ans d'emprisonnement est donc définitive.
«Dans la sérénité»
En revanche, Youssef Aït Boulahcen, le frère d'Hasna et le cousin d'Abdelhamid Abaaoud, sera bien rejugé pour «non-dénonciation de crime terroriste». «J'ai fait appel car tout simplement je suis innocent des faits qui me sont reprochés», a-t-il expliqué à la cour, d'une voix claire et posée. Il avait été condamné à quatre ans de prison, dont un an avec sursis, accusé de ne pas avoir dénoncé le nouvel attentat qu'Abaaoud comptait commettre. La cour l'entendra jeudi et vendredi. Puis ça devrait être le tour de Jawad Bendaoud le 28, 29 et 30 novembre.
La salle était quasiment remplie d'avocats mercredi matin. Ils étaient une cinquantaine, pour défendre des centaines de victimes. Ces dernières étaient en revanche dans une salle de retransmission, la 16ème chambre n'étant pas suffisamment grande. Une avocate de parties civiles, Frédérique Giffard, a fait part du «profond sentiment de relégation» des victimes, à cause de cet «éloignement physique». «Nous serons très vigilants pour que cette situation ne se reproduise pas, notamment pour le procès des attentats du 13 Novembre», a-t-elle déclaré à la cour.
«J'espère que le procès se déroulera dans la sérénité et le respect des familles», a dit à l'AFP une autre avocate de parties civiles Samia Maktouf, avant le début du procès. «J'espère que le show et le cirque auxquels nous avons assistés en première instance ne se reproduira pas», a-t-elle ajouté. Jawad Bendaoud s'était livré à un one-man-show lors de ce procès, exaspérant les victimes des attentats.