Pas de «mollissement» mais pas de «précipitation» : l'élargissement de la PMA, source de tensions jusque dans la majorité, figurera dans un projet de loi sur la bioéthique présenté avant la fin de l'année, a affirmé le gouvernement mercredi, face à «l'empressement» de certains LREM.
Sur ce sujet sensible de l'ouverture de la Procréation médicalement assistée aux femmes célibataires et aux couples de femmes, promesse de campagne d'Emmanuel Macron, l'exécutif apparaît sur une ligne de crête. En octobre, le président avait d'ailleurs souhaité un «débat apaisé».
Pas question d'«isoler» la PMA des autres sujets bioéthiques, comme le souhaitait notamment le député LREM Guillaume Chiche via une proposition de loi attendue jeudi.
«Un projet de loi sera présenté en Conseil des ministres avant la fin de l'année, pour un examen (au) début du premier trimestre de l'année prochaine», a déclaré le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux. Le comité d'éthique (CCNE) doit rendre à la rentrée son avis sur les thèmes des Etats généraux de la bioéthique.
Le porte-parole a plaidé qu'«il ne faut pas confondre vitesse et précipitation», récusant «le début d'un commencement d'un mollissement du gouvernement».
«La bioéthique est un sujet global, qui ne peut être détricoté», a défendu aussi le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement Christophe Castaner mardi devant les députés LREM, selon des propos rapportés. Et «mieux vaut travailler avant de communiquer», a lancé le président du groupe Richard Ferrand mercredi, au lendemain d'une réunion de groupe marquée par un échange tendu, avec quelques invectives, sur la PMA.
Le président de l'Assemblée François de Rugy (LREM) avait défendu mercredi matin l'initiative d'une proposition de loi comme «une façon de passer à l'action».
Le texte de Guillaume Chiche prévoit le même dispositif de filiation pour les couples de femmes homosexuelles que pour les couples hétérosexuels. Il ne prévoit pas à ce stade le remboursement de la «PMA pour toutes» par la Sécu, bien que son auteur y soit favorable.
Mais «c'est un sujet délicat, qui divise et même oppose, et il aurait fallu la jouer collectif», d'autant qu'une mission d'information parlementaire sur la bioéthique vient d'être lancée, a reproché Agnès Thil à Guillaume Chiche.
Cette députée revendiquée «chrétienne» a déclaré à l'AFP être «inondée par les lobbies LGBT» mais il y a aussi «des gens contre, on doit les écouter et les respecter».
En réunion, M. Chiche a notamment répliqué qu'«on poursuit un objectif commun: lutter contre une discrimination fondée sur l'orientation sexuelle», récusant toute «démarche individuelle», selon des participants.
«A couteaux tirés»
«C'est assez à couteaux tirés. Il y a une scission qui apparaît de plus en plus forte au sein du groupe», témoignait mercredi un «marcheur».
Selon Jean-Louis Touraine (LREM, ex-PS), rapporteur de la mission d'information et pro-PMA, M. Chiche «veut se prémunir contre des reports répétés, et contre une PMA a minima». A l'inverse, le patron des députés MoDem, Marc Fesneau, a jugé nécessaire de prendre le temps, ne voyant «pas d'urgence» à faire voter une loi sur ce sujet «complexe».
Quant au président de la République, «il n'aime pas ces sujets parce qu'il considère que ce sont des débats qui hystérisent la société, il est précautionneux», observait récemment une «marcheuse». «Il n'a pas envie de revivre la Manif pour tous», selon une hypothèse de Jean-Louis Touraine, trouvant cependant «illusoire d'espérer un consensus».
Le président LR du Sénat Gérard Larcher a, lui, affirmé son opposition à «une procédure accélérée», soulignant que ce sujet «nécessite le temps, le sérieux».
Après les déclarations de Benjamin Griveaux, Ludovine de la Rochère, présidente de la Manif pour tous, opposée à la réforme de la PMA, a jugé «sage et raisonnable de laisser du temps au débat sur un enjeu aussi majeur».
Catherine Michaud, présidente de GayLib, mouvement LGBT de centre droit, rallié au Mouvement radical, est favorable à un projet de loi «dédié à la PMA», avec «symboliquement plus de force».
Laurène Chesnel, déléguée «Famille» à l'Inter-LGBT, lesbienne et mère de deux jumelles par PMA, a craint que l'intégration au paquet bioéthique ne permette pas «d'aborder la question de la filiation pour les autres cas que les PMA réalisées en hôpital en France», coparentalité, PMA à l'étranger ou inséminations artisanales.