Plusieurs milliers de personnes ont manifesté mardi à Mamoudzou, chef-lieu de Mayotte, contre l'insécurité et l'immigration clandestine mais aussi pour réclamer davantage d'actions de l’État, alors que la ministre des Outre-mer Annick Girardin se trouve sur place.
«On est là pour crier notre colère. A partir d'aujourd'hui, nous allons défier le gouvernement», avait lancé un peu plus tôt un porte-parole du collectif, au début de la manifestation. Les manifestants se sont ensuite rendus à la mairie de Mamoudzou, où ils ont trouvé porte close.
Dans le cortège, en garde partie composé de mahoraises portant le salouva (costume traditionnel) flottaient de nombreux drapeaux français, européens, ou siglés «département de Mayotte». Sur certaines banderole, on pouvait lire : «Non à la conférence, oui aux actions», en référence à la conférence sur l'avenir de Mayotte, qu'avait proposée la ministre la semaine dernière.
«Je suis là pour la sécurité principalement, et pour tous les problèmes sociaux», a expliqué à l'AFP Lisa, enseignante de 26 ans. «Ici, n'essayez pas d'aller à l'hôpital, il n'y a pas de place, n'essayez pas d'aller à la CAF. Et dans l'éducation, ça ne va pas, il n'y a pas assez d'écoles, pas de moyens. On se fait voler le matériel scolaire, on me demande d'emmener mon propre matériel personnel, ça ne va pas», explique-t-elle.
«La ministre, elle n'a rien dit, je l'ai trouvé nulle, on demande des actes», ajoute-t-elle.
«On n'est plus chez nous. On nous tue. Que les clandestins retournent à Anjouan ou en métropole», hurle une autre manifestante, sans vouloir donner son nom.
Dans le même temps, entre 200 à 300 manifestants ont investi le conseil départemental, notamment pour dénoncer la «trahison» de certains élus qui ont accepté la veille de discuter avec la ministre, à Dzaoudzi.
Parmi les élus qui se trouvaient sur place et ont dû quitter l'hémicycle sous les huées des manifestants, le président du conseil départemental, le sénateur LREM Thani Mohamed Soihili, les maires de Mamoudzou, Tsingoni et Chirongui, et le président de l'association des maires.
La ministre, arrivée lundi dans un climat tendu, doit rencontrer dans l'après-midi à nouveau les élus, mais aussi le collectif et l'intersyndicale, initiateurs du mouvement de contestation populaire, qui avaient lundi refusé de la voir.
Pour Inayati Kassim, chargée de mission de 37 ans, «la délinquance s'est multipliée ces dernières années, Toutes les maisons sont barricadées. et même quand on est chez nous on se fait cambrioler», explique-t-elle.
«Il y a trop d'immigration, on est trop nombreux pour une si petite surface», insiste cette manifestante. Elle poursuit : «Tous les services de l’État sont débordés, aller aux impôts ou à l'état civil, ça vous prend une journée».
«L'hôpital aussi est saturé», dénonce Marie-Dachahou Assiaty, 37 ans, secrétaire. «On est obligé d'aller accoucher à La Réunion ou en métropole, car on nous dit 'vous avez la Sécu, vous pouvez aller accoucher ailleurs'. Mais je cotise quand même», s'insurge cette mère de deux enfants, qui «a de plus en plus peur et envie de partir de Mayotte».
Après un tour dans les rues de Mamoudzou, le cortège est retournée sur la place de la République, pour des prises de paroles. «Le combat continue», a lancé un porte-parole à la tribune.