La lutte contre la pauvreté doit d’abord cibler les enfants et passera par l’éducation : c’est le credo d’Emmanuel Macron, qui a réuni mardi à l'Elysée les principales associations concernées et a visité une crèche en banlieue parisienne.
Avant l'arrivée du chef de l'Etat, quelques dizaines de personnes s'étaient rassemblées devant la crèche "Les petits chaperons rouges" de Gennevilliers (Hauts-de-Seine), qui accueille une forte proportion d'enfants de familles défavorisées, pour protester notamment contre la baisse des APL, avant d'être repoussées par des CRS.
A l'Elysée, l'ambiance était beaucoup plus policée. A leur sortie d'un déjeuner autour du président de la République et de quatre ministres (Solidarités, Education, Travail, Egalité femmes-hommes), plusieurs représentants d'associations ont salué "une réunion positive".
La plupart se sont cependant interrogés sur les moyens qui seront alloués à la politique de lutte contre la pauvreté.
"Les axes d'entrée, sur la pauvreté des enfants et des jeunes, sont intéressants, mais il y a des retraités, des personnes seules qui sont pauvres. On ne peut pas saucissonner les pauvres, il faut une vision globale, ce que le président a concédé sur la question de la grande pauvreté", a déclaré devant la presse Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre.
Ces rendez-vous, organisés à l'occasion de la journée mondiale du refus de la misère, marquaient le lancement d'une concertation d'environ six mois avec les différents acteurs, pour définir une nouvelle politique de lutte contre la pauvreté qui portera "un focus particulier sur la pauvreté des enfants et des jeunes", a déclaré Agnès Buzyn, ministre des Solidarités.
"Il nous faut investir socialement pour que les enfants qui sont pauvres (...) ne soient pas les pauvres de demain", estime l'Elysée. Selon l'Insee, 13,9% de la population vivait sous le seuil de pauvreté en 2016, soit près de 9 millions de personnes. Un enfant sur cinq en France vit sous le seuil de pauvreté.
"La pauvreté a changé de visage, elle touche de plus en plus d'enfants, de familles, notamment monoparentales, et de plus en plus de jeunes", a souligné Mme Buzyn.
'Inquiétudes'
En réponse aux inquiétudes des associations, la ministre a assuré que cette "approche renouvelée", qui partira "d'initiatives locales", sera "interministérielle", impliquant les politiques du logement, de l'éducation nationale, du travail et de la formation.
Le gouvernement entend également poursuivre les efforts en faveur de l'"accès aux droits", a-t-elle précisé, alors que de nombreuses personnes ne demandent pas les prestations auxquelles elles sont éligibles. Des actions engagées sous le précédent quinquennat seront poursuivies, a assuré Mme Buzyn, citant notamment "la garantie jeunes", dispositif d'accompagnement pour les 16-25 ans très éloignés de l'emploi.
"Il y a une volonté d'agir sur plusieurs plans, dont la lutte contre la grande pauvreté", a salué Patrice Blanc, président des Restos du Coeur, à sa sortie de l'Elysée. Sur la question des moyens, "le président nous a indiqué qu'ils seraient dégagés quand la route serait tracée".
"Partir de l'enfance va permettre de travailler sur l'ensemble de l'accès aux droits: logement, travail pour les parents, accès à l'éducation, santé, culture", a estimé Claire Hédon, présidente d'ATD Quart Monde, saluant "un dialogue de qualité, après les fortes incompréhensions" suscitées pendant l'été par les baisses des APL et des contrats aidés.
Comme d'autres associations, elle a cependant exprimé ses "inquiétudes" sur le niveau des minimas sociaux: après les revalorisations annoncées du minimum vieillesse, de l'allocation pour adultes handicapés et de la prime d'activité, il n'y a "rien sur le RSA".
François Soulage, président du collectif Alerte, a cependant senti "une petite ouverture" sur les bénéficiaires du RSA. Selon lui, le président estime "qu'on peut trouver des solutions qui permettent d'améliorer la situation des personnes, dès lors qu'elles se mettent en route sur un projet".
La concertation doit déboucher sur un plan d'action vers mars-avril, avec entretemps la nomination d'un ou une délégué(e) interministériel(le), selon l'Elysée.