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Sur des grues ou dans la rue, les "pères en colère" sur le terrain

Nicolas Moreno et Serge Charnay le 16 février 2013 sur une grue à Nantes [Frank Perry / AFP/Archives] Nicolas Moreno et Serge Charnay le 16 février 2013 sur une grue à Nantes [Frank Perry / AFP/Archives]

Perchés sur une grue, une cheminée d'usine ou retranchés dans une cathédrale, les "pères en colère" ont multiplié les actions spectaculaires ces derniers mois. Dimanche, ils défileront à Paris pour réclamer l'"égalité parentale".

Cette "marche des pères" est organisée par le Collectif pour la Coparentalité (CopCo), qui compte parmi ses "membres fondateurs" Nicolas Moreno et Scott Alexander Reiss, a indiqué à l'AFP un porte-parole, Brigitte Volmat, mère du premier.

Nicolas Moreno a déjà mené plusieurs actions pour protester contre le fait que son ex-compagne - dont il conteste les accusations de violences conjugales - ait déménagé à des centaines de kilomètres avec leurs deux fils et qu'elle en ait la garde. Scott Alexander Reiss, qui se plaint lui aussi d'être privé de son enfant, est mis en examen pour agression sexuelle sur sa fille, selon le parquet de Privas (Ardèche).

Dimanche, ils espèrent réunir plusieurs centaines de personnes pour réclamer "une loi qui dise qu'en cas de séparation, la résidence alternée s'applique par défaut, sauf dans des cas particuliers, de violences par exemple", selon Mme Volmat. Les participants iront de Montparnasse au ministère de la Famille.

Les actions de ces pères se sont multipliées depuis que Serge Charnay, privé de droit de visite à la suite de deux "soustractions d'enfant" dont une avec violences, a passé trois jours juché sur une grue, en février à Nantes. Ils ont été rejoints par quelques femmes, souvent des grands-mères paternelles, mais sont très contestés par les féministes.

Masculinistes ou pères modernes?

"La garde alternée ne peut se faire que de manière consensuelle, elle ne doit pas être imposée", proteste Carole Lapanouse, présidente de l'association SOS Les Mamans. "Il faut faire très attention à ne pas se laisser piéger par une image qu'on trouve tous très admirable de pères luttant pour voir leurs enfants", prévient Anne-Cécile Mailfert, porte-parole d'Osez le féminisme. "Sous cette image touchante, se cachent des idées extrêmement réactionnaires".

Patric Jean, un porte-parole de l'association Zero Macho, composée uniquement d'hommes, y voit un mouvement analogue à l'organisation anglo-saxone "Fathers4Justice", qu'il dit avoir infiltrée au Québec, et qui véhicule l'idéologie "masculiniste".

"Leur vrai combat est de revenir à une situation ancienne et fantasmée" basée sur des valeurs patriarcales, affirme-t-il, déplorant que ces hommes soient soutenus par des organisations ayant "pignon sur rue", telles que SOS Papa, membre de l'Unaf (Union nationale des associations familiales).

"Mensonge" et "désinformation", réplique Olivier Besida, vice-président de SOS Papa. "Nous voulons que les deux parents puissent voir les enfants à part égale, qu'en aucune façon la mère ait une autorité suprême sur les enfants et le père soit juste un pourvoyeur d'argent et un distributeur de sperme".

Une récente étude de l'Ined (Institut national d'études démographiques) estimait que 21% des enfants ayant vécu principalement chez leur mère dans l'année qui a suivi la séparation ne voient plus leur père une fois adultes, comparé à 1% s'ils étaient en résidence alternée.

Gérard Ollivier, un des coordinateurs du Collectif de la grue jaune, assure pour sa part que son "unique revendication" est "l'égalité parentale". "Les machistes nous causent à nous aussi du tort parce qu'ils salissent l'image des pères modernes que nous représentons. Ne faites pas, s'il vous plait, d'amalgame entre eux et nous", écrit-il dans une "lettre aux féministes".

Nicolas Moreno le 16 février 2013 à Nantes [Jean-Sebastien Evrard / AFP/Archives]
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Nicolas Moreno le 16 février 2013 à Nantes
 

"Nous sommes au début d'une tendance nouvelle", estime le sociologue Michel Fize, chercheur au CNRS. "La prudence impose de regarder au cas par cas, et de ne pas enfermer tous ces pères dans une même catégorie à laquelle on n'est pas sûrs qu'ils appartiennent".

La Chancellerie et le ministère de la Famille ont créé un groupe de travail sur la coparentalité, qui doit rendre ses conclusions en novembre. "L'idée qui se dégage et qui devrait être reprise dans la loi +familles+ est de favoriser le recours à la médiation", indique l'entourage de Dominique Bertinotti.

La garde des enfants est accordée à la mère dans 72% des divorces, tandis que la résidence alternée représente 20%, selon des chiffres de la Chancellerie datant de 2010.

Mais la grande majorité des cas se règlent de façon consensuelle. Selon une étude de 2007, seuls 2% des divorces et 6% des séparations se soldent par un désaccord sur la résidence des enfants.

 

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