L'Assemblée nationale a voté mercredi la création d'une commission d'enquête sur la fermeture de l'usine Goodyear d'Amiens-Nord (Somme), demandée par des députés socialistes et écologistes.
Toute la gauche a voté, à main levée, pour la proposition de résolution sur la création d'une commission d'enquête visant à examiner les "causes économiques et financières" du projet de fermeture de l'usine ainsi que ses "conséquences économiques, sociales et environnementales", tandis que l'UMP s'est abstenu, comme l'UDI.
La création de cette commission, décidée en présence du ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg, intervient près d'une semaine après le rejet par le juge des référés de Nanterre (Hauts-de-Seine) de la demande de suspension de la restructuration de l'usine d'Amiens-Nord (1.173 salariés), vouée à la fermeture.
Après avoir observé que "la bonne santé financière revendiquée par Goodyear est assez incompatible avec l'argument économique invoqué à l'appui des suppressions d'emplois, comme l'ont toujours soutenu les salariés de l'entreprise qui luttent depuis six ans", la députée PS Pascale Boistard a estimé que la commission devra "déterminer les réelles intentions de l'industriel et le mettre face à ses responsabilités, veiller à l'anticipation et à la minoration des conséquences sociales et environnementales en cas de fermeture, décourager les pratiques anormales".
Les 30 membres de la commission d'enquête devront "se donner les moyens de rechercher si les tractations engagées entre Titan (repreneur potentiel ndlr) et Goodyear étaient fictives", "si Goodyear a tenté de dissimuler une délocalisation" et si "tout a été sincèrement entrepris pour sauvegarder l'activité industrielle et les emplois" vu le rejet par la direction du projet de création d'une Scop par les salariés, a ajouté cette élue de la Somme.
L'écologiste Barbara Pompili, également députée de la Somme, a considéré que la commission sur le cas de Goodyear-Amiens permettrait de "se pencher concrètement sur les stratégies mises en oeuvre par de grands groupes pour justifier des plans sociaux incompréhensibles". "Si la volonté de délocaliser des activités de l'entreprise était avérée, ce serait un détournement du droit français", a notamment estimé la coprésidente du groupe écolo.
Dans le cas de Goodyear-Amiens, le député radical de gauche de l'Aisne Jacques Krabal a jugé que "vouloir démêler le vrai du faux n'est pas facile" mais que l'"essentiel est la préservation du site industriel et des emplois" et qu'il faut "travailler vite car le risque est grand que le rapport de la commission d'enquête arrive trop tard".
Pour le Front de Gauche, Patrice Carvalho a souhaité que la commission d'enquête sur ce "dossier emblématique sur le mode opératoire employé par les grandes multinationales pour liquider un site", fasse "des préconisations suivies d'effets pour mettre un terme à la braderie de nos industries et de nos emplois".
S'il a affirmé que la fermeture de l'usine serait "un drame économique et social" et "l'épilogue d'un conflit entre la direction et le syndicat majoritaire (la CGT)", l'UMP Alain Gest a invoqué des "raisons essentiellement juridiques" pour ne pas voter la création de la commission.
"Le rôle du Parlement ne peut être d'enquêter à chaque fermeture de site industriel", a estimé ce député de la Somme.
L'UDI Franck Reynier a critiqué "une procédure dévoyée" dans "l'intérêt politique des auteurs de cette proposition", refusant de "clouer au pilori des boucs émissaires tout désignés". "Les salariés de PSA Aulnay, de Doux ou de Michelin Joué-les-Tours ne méritent-ils pas la même attention?", a lancé ce député de la Drôme.
Il a jugé nécessaire que la commission mesure les "défaillances du dialogue social, qui, à l'évidence, a échoué".