Barrages routiers, stations service vides et trafic aérien en dents de scie: la vie était fortement perturbée dimanche en Nouvelle-Calédonie où malgré des discussions marathon, la grève générale contre la vie chère se poursuit.
A Poya, village à 200 km au nord de Nouméa frontalier des provinces nord et sud, un barrage avec carcasses de voitures et pneus enflammés empêche la circulation sur la route principale de l'archipel.
Une automobiliste a affirmé sur une radio locale que les manifestants avaient entrepris de casser la route avec des engins.
Des militants tiennent en outre cinq à six autres barrages, plus ou moins filtrant, dans l'intérieur de l'île.
Les dépôts de carburant étant bloqués depuis plusieurs jours, plus aucune goutte d'essence n'est disponible dans les stations service, tandis que le port est lui aussi bloqué depuis le début de la semaine.
Devant les deux hypermarchés de Nouméa, fermés, plusieurs dizaines de syndicalistes ont installé des bâches et des barbecues. Le trafic des compagnies aériennes est également fortement perturbé et l'aéroport international de Nouméa-La Tontouta sera bientôt en rupture de carburant.
Face à cette crise qui s'enlise, responsables politiques, organisations patronales et l'intersyndicale contre la vie chère sont réunis depuis samedi, sous l'égide du haut-commissaire, Jean-Jacques Brot, pour tenter de trouver une issue.
L'intersyndicale, qui a déclenché la grève générale le 15 mai, réclame une baisse "immédiate des prix", ainsi que l'application d'accords économiques et sociaux, signés en juin dernier. Ces derniers prévoient notamment une refonte de la fiscalité, une transparence des prix et une plus grande concurrence.
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Les participants à ce sommet social ont discuté sept heures d'affilée samedi puis dimanche toute la journée, avant de décider d'embrayer sur une nuit de négociations. Tous ont fait part de leurs craintes que ce conflit "dégénère avec des violences".
Une négociation "assez âpre"
"Nous resterons ensemble jusqu'à ce qu'une solution arrive. On ne peut pas rester dans cette situation pour l'économie de la Nouvelle-Calédonie", a déclaré dimanche soir Jean-Jacques Brot sur la chaîne de télévision NC Première.
"Les choses avancent. (...) J'ai bon espoir que l'on arrive progressivement à valider un certain nombre de points", a-t-il également déclaré.
Il a en revanche exclu une intervention des forces de l'ordre sur les barrages et les blocages "tant que les discussions ont lieu car elles sont fondées sur la confiance".
De son côté, Sonia Backes, en charge de la fiscalité au sein du gouvernement local, a également fait part d'une progression à petits pas des débats sur des produits non taxés, des limitations des marges, des baisses de prix immédiates de 10%, ou des révisions du prix des fruits et légumes.
L'intersyndicale, qui réclame depuis plusieurs années une "réforme structurelle de l'économie de la Nouvelle-Calédonie", a réaffirmé sa volonté "de ne rien lâcher".
"La négociation est assez âpre mais il y a des avancées sur un certain nombre de points. Pour le moment, elles ne permettent pas de relâcher la pression. Nous ne sortirons pas avec un accord au rabais", a déclaré David Meyer, secrétaire général de la Fédération des Fonctionnaires.
Le coût de la vie et la mise en oeuvre d'une fiscalité plus équitable ont fait l'objet de nombreux rapports ces dernières années en Nouvelle-Calédonie où un processus de décolonisation, octroyant aux élus locaux de larges pouvoirs, est en cours.
La zizanie qui règne actuellement sur le théâtre politique local n'a cependant pas permis d'adopter de réformes de structure, expliquant l'initiative du représentant de l'Etat pour orchestrer des discussions globales et tenter de sortir de la crise.
"J'ai accepté d'être le garant du résultat des débats en cours", a déclaré M. Brot.