Des milliards d'euros sont en jeu après l'annulation en justice d'une importante composante du tarif de l'électricité, mais il est beaucoup trop tôt pour envisager et encore moins chiffrer un éventuel remboursement aux clients, ont rappelé jeudi les principaux acteurs de ce litige.
Le Sipperec, un important syndicat intercommunal francilien qui dénonce depuis 2009 l'opacité des tarifs de l'électricité, et avait déjà fait annuler le mois dernier les tarifs réglementés de 2009-2010, a obtenu de nouveau gain de cause mercredi auprès du conseil d'Etat.
Celui-ci a invalidé le Turpe 3, c'est à dire le tarif d'acheminement de l'électricité pour la période 2009-2013, qui avait été fixé par le gouvernement de droite sur proposition du régulateur, la CRE (Commission de régulation de l'énergie).
Ce tarif, qui représente 46% de la facture hors taxe des consommateurs d'électricité, en moyenne, sert à rémunérer les dépenses des deux gestionnaires du réseau électrique français, RTE et ERDF, toutes deux filiales du géant national EDF.
Pour simplifier les choses, le Conseil d'Etat a considéré que la CRE avait surestimé certains frais financiers d'ERDF dans le calcul du tarif d'acheminement, (à hauteur de 1,9 milliard d'euros par an selon le Sipperec), et devrait également restituer 300 millions d'euros par an au titre de provisions excessives.
Mais le Sipperec se garde bien d'agglomérer ces chiffres, comme l'a fait jeudi le Parisien, aboutissant à un total de 8,8 milliards d'euros à rembourser par ERDF, étant donné que les sommes qui pourraient être potentiellement remboursées dépendront des nouveaux calculs de la CRE, et risquent de s'avérer inférieures.
Et il se refuse de même à cautionner la somme de 250 euros qu'ERDF devrait rembourser à chaque particulier, mentionné par le quotidien.
"Il est trop tôt pour dire quelles répercussions cela aura demain. Une fois que la CRE aura changé sa méthode de calcul et la soumettra à consultation (ce qu'elle devra faire d'ici juillet, ndlr), on verra alors sur combien porte réellement le litige et combien il restera potentiellement à l'arrivée à rembourser", a expliqué à l'AFP Catherine Dumas, directrice générale adjointe du Sipperec.
Outre l'incertitude sur le montant total des remboursements potentiels, il faut également tenir compte du fait qu'ils seront à répartir entre tous les consommateurs d'électricité desservis par ERDF, et donc aussi bien les petites entreprises et les collectivités que les particuliers. Ce qui limitera la part revenant à chacun.
La CRE a elle même appelé à la prudence, en soulignant jeudi qu'"il est pour le moment trop tôt pour apprécier l'impact de ce changement de méthode sur le niveau du Turpe".
De son côté, ERDF a démenti jeudi des propos de sa patronne Michèle Bellon rapportés par le Parisien, selon lesquels le gestionnaire de réseau attendait "les nouveaux calculs de la CRE pour étudier les modalités de remboursement".
La présidente d'ERDF, Michèle Bellon, "dément formellement la citation qui lui a été attribuée dans le journal Le Parisien. Elle n'a pas connaissance d'une éventualité de remboursement", a indiqué le gestionnaire de réseau à l'AFP.
En attendant, l'éventualité de tels remboursements a fait plonger l', maison-mère à 100% d'ERDF, qui évoluait déjà depuis ses semaines à des plus bas depuis l'introduction en Bourse du groupe public en 2005, vers de nouvelles profondeurs boursières.
Elle a touché un nouveau plus bas en séance, à 13,39 euros, soit une dégringolade de 6% par rapport au cours de la veille, et évoluait en baisse de 3,47% à 13,77 euros à la mi-journée.
Dans la foulée, EDF a assuré que la décision du Conseil n'entraînerait "aucun remboursement de (sa) part envers ses clients" et que "cette décision ne devrait pas avoir de conséquence sur le résultat du groupe".