Il a poussé à Bâle, a stagné au Bayern Munich et déçu à l'Inter Milan avant de vite rejoindre la Premier League et Stoke City : à 24 ans, Xherdan Shaqiri, à qui l'on demande beaucoup et pardonne peu, portera encore sur ses épaules les espoirs de toute la Suisse.
Chef de meute, maître à jouer et buteur (17 réalisations en 51 sélections), la pépite suisse d'origine kosovare tarde pourtant à confirmer tous les espoirs placés en lui depuis son passage en Bavière où malgré un statut de joker il avait laissé entrevoir, par intermittence, de belles promesses. Pour son premier Euro, après une Coupe du monde brésilienne achevée en 8e de finale face à l'Argentine, Shaqiri devra d'abord lever les doutes. D'abord ceux soulevés par son arrivée l'été dernier dans un club de seconde zone, qu'il a aidé à terminer la saison en milieu de tableau. Mais aussi et surtout ceux nés d'une campagne de qualification très poussive, voire laborieuse.
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Qualifiée à la 2e place, derrière l'Angleterre qu'elle n'a jamais été en mesure d'inquiéter, la Suisse arrive en France avec plus d'interrogations que de certitudes. Fragile physiquement, Shaqiri paie également le déficit d'autorité et de charisme du sélectionneur Vladimir Petkovic qui par ses hésitations dans le choix des joueurs et également en raison d'une cascade de blessures, n'a pas contribué à dégager une équipe type. Ainsi en mars, avant d'affronter l'Irlande en match de préparation, où la Nati, privée de Shaqiri blessé, s'est inclinée 1 à 0, Petkovic a-t-il choisi de se passer de son capitaine Gökhan Inler, sur une voie de garage chez le champion d'Angleterre Leicester.
"Un joueur qui n'est pas régulièrement aligné en club ne peut constituer un candidat sérieux pour l'équipe nationale", estimait alors Petkovic pour expliquer la mise à l'écart de l'ancien Napolitain, qui, malgré sa relative lenteur, stabilisait le milieu de terrain au service des joueurs à vocation offensive tels Shaqiri et Valon Behrami. Quatre jours plus tard, les Helvètes s'inclinaient encore (2-0), cette fois face à la Bosnie-Herzégovine, montrant d'inquiétants signes de faiblesse en défense.
Evaluer la nouvelle situation
Auteur d'un triplé historique à l'été 2014 au Mondial brésilien face au Honduras (3-0), qui propulsait la Suisse en 8e de finale, Shaqiri, capable d'éclairs "dignes des grands joueurs", selon Didier Tholot, l'entraîneur français du FC Sion, peut-il transfigurer la Nati ? "Shaqiri peut marquer, notamment sur coups francs, ou aider à marquer à tout moment", ajoute Tholot, qui mise aussi sur le prometteur attaquant de Bâle, Breel Embolo, 19 ans. Il faudra tout le talent des deux joueurs les plus doués de l'équipe pour aider les Suisses à s'extirper d'un groupe où ils rencontrent la France, la Roumanie et l'Albanie.
Shaqiri aura deux occasions d'acquérir quelques certitudes, contre la Belgique le 28 mai et la Moldavie le 3 juin, avant le lever de rideau de l'Euro durant lequel il jouera une partie de son avenir en club, lui qui veut de nouveau tutoyer les sommets d'un grand championnat. Quant à son avenir en sélection, il se dessine avec la Nati malgré l'admission du Kosovo, sa région d'origine, vendredi par la Fifa, ce qui permettra à cette ancienne province serbe de disputer les qualifications pour le Mondial-2018.
Outre Shaqiri, deux des autres piliers de l'équipe suisse, Behrami et Granit Xhaka, sont d'origine kosovare mais le vice-président de la Fédération du Kosovo, Agim Ademi, interrogé récemment par le journal suisse Le Matin, ne se faisait guère d'illusions: "Nous les accueillerons à bras ouverts mais le choix leur appartient. Or la Nati leur a tout donné. Les Xhaka, Shaqiri et Behrmai vont rester". Mais si Behrami a assuré qu'il jouerait "toujours pour l'équipe suisse", Shaqiri n'avait quant à lui par refermé complètement la porte: "Si un jour le Kosovo est admis par l'UEFA, il faudra évaluer la nouvelle situation".