Débuté le 2 septembre, le procès des viols de Mazan se poursuit devant la cour d’assises d’Avignon. Entre la diffusion des images des viols, voici ce qu’il fallait retenir de cette nouvelle semaine d’audience du 7 au 11 octobre.
Un procès historique. Le procès de Dominique Pelicot jugé, aux côtés de 51 autres hommes, pour avoir soumis chimiquement son ex-épouse durant dix ans et l’avoir violé et faite violer par les coaccusés se poursuit.
Joël Pelicot décrit un frère manipulateur
Le frère de Dominique Pelicot a été entendu ce mardi 8 octobre. Joël Pelicot, ancien médecin, âgé de 75 ans est le seul témoin de son cercle proche à dépeindre «un grand manipulateur» et ce «dès l’enfance». «Il avait une faculté à adapter son discours pour mieux manipuler et à mentir au fur et à mesure, on le savait», a-t-il ajouté.
Joël Pelicot est allé plus loin en rejetant les affirmations de l’accusé qui a décrit une enfance violente. Son grand-frère a de son côté affirmé avoir vécu des «jours heureux» avec des «parents attentionnés, aimants, qui faisaient ce qu'ils pouvaient», malgré «les châtiments corporels (qui) étaient monnaie courante», à cette époque.
«Ça ne m'a pas empêché de l'aimer, c'était le petit frère, on lui passait ses travers», a-t-il poursuivi, visiblement affecté par la situation.
Des déclarations qui ont profondément énervé Dominique Pelicot qui a dénoncé «un mensonge» et accusé son aîné d’avoir «couvert pendant des années» des faits incestueux imposés par leur père à leur sœur adoptive.
Gisèle Pelicot en échange des travaux de jardinage
Ce-même jour, la cour a entendu les témoignages de deux hommes approchés par Dominique Pelicot mais dont les dossiers étaient vides. Tous deux ont eu des contacts avec le principal accusé via le site libertin, depuis fermé, coco.gg.
Le premier, Jérôme B. 42 ans, est chauffeur routier. Identifié sur le disque dur dans lequel Dominique Pelicot gardait les photos et vidéos des viols subis par son épouse, le fichier de Jérôme B. était néanmoins vide.
En effet, comme il l’a expliqué à la cour : « Dominique Pelicot me demande de faire des travaux de jardinage et en échange, il m'offre sa femme. Je lui propose un samedi matin, il me dit non car il lui donne un cachet pour l'endormir. Il ajoute qu'il drogue sa femme et l'offre à des hommes très souvent. Je lui réponds que c'est du viol et que je ne suis pas d'accord».
Le second dossier vide du disque dur est celui de Cyril F. qui a expliqué avoir discuté avec Dominique Pelicot jusqu’à ce que ce dernier lui explique droguer sa femme et «qu'elle dormirait sûrement», lors de sa visite.
«J'ai pensé que c'était un jeune qui racontait n'importe quoi, je ne pensais pas du tout que quelqu'un pouvait droguer sa femme et j'ai coupé court», a-t-il ajouté.
Gisèle Pelicot quitte la salle
Un autre accusé a également été entendu cette semaine. Vincent C., 42 ans, s'était rendu en octobre 2019 et en janvier 2020 chez Gisèle et Dominique Pelicot, après avoir échangé en ligne avec ce dernier. Pensant s’adonner à du libertinage, il s’est donc rendu une première fois au domicile du couple.
«Sur le moment, je trouve ça bizarre, mais je me sens en confiance, je pensais être invité par le couple. Jamais je ne me serais imaginé qu'il puisse faire ça à sa femme dans son dos», a-t-il déclaré à la barre, ce mercredi 9 octobre.
Trois mois plus tard, il a à nouveau discuté sur Internet avec l’accusé principal. Il a expliqué : «Je lui fais remarquer que je suis déjà venu et que j'ai trouvé ça bizarre. Il me dit "non, on a regardé la vidéo et elle a apprécié". Ç'a fermé les portes du doute».
Vincent C. qui a reconnu les faits devant la cour, a répété qu'il n'admettait pas avoir eu l'intention de commettre un viol ou de l'avoir perçu comme tel sur le moment. Des déclarations qui ont entraîné le départ de Gisèle Pelicot. Cette dernière a tonné : «Je ne supporte pas ça !»
Néanmoins, cette dernière était présente lors du visionnage des deux vidéos des viols commis par son mari avec Vincent C.. Si elle est restée stoïque, Dominique Pelicot s’est caché le visage et bouché les oreilles durant la projection, tout comme son coaccusé.
Un viol «à contre-cœur»
De son côté, Patrick A., 60 ans, a pour sa part témoigné ce jeudi 10 octobre. Il a expliqué avoir découvert son homosexualité après un premier mariage raté. Sur Coco.gg, il a rencontré Dominique Pelicot en 2018.
Selon les enquêteurs, Patrick A. était au courant qu’il s’agissait de viol. Dominique
Pelicot lui ayant dit : «Je cherche un complice pervers pour abuser de ma femme, elle prend des somnifères et j'en profite».
À la barre, le sexagénaire a déclaré ne pas avoir réellement fait attention au contenu de ces messages, pas plus inquiétant que ceux des nombreux «mythos» qui fréquentant le site, répétant être homosexuel.
Il a d'ailleurs dit avoir prodigué deux fellations à Dominique Pelicot dès son arrivée au domicile du couple avant que celui-ci ne l'invite à passer dans la chambre conjugale où Gisèle Pelicot gisait, assommée par les somnifères. Ça «l'excitait si on faisait ça à côté de sa femme», a-t-il confié.
Patrick A. fait partie des 14 accusés ayant reconnu les faits. Néanmoins, il a expliqué avoir violé Gisèle Pelicot «à contre-cœur» en suivant les indications de Dominique Pelicot.
Cette déclaration a fait fortement réagir Me Antoine Camus, un des avocats de cette dernière, qui a asséné : «Vous êtes homosexuel mais vous avez commis un viol hétérosexuel, que vous reconnaissez ! Dans ce procès, nous avons déjà eu les viols par accident, votre particularité, c'est de plaider le viol à contre-cœur».
Le procès doit se poursuivre jusqu'en décembre prochain.