Sans réponse de la part du gouvernement concernant sa demande de reconnaissance de la responsabilité de l'Etat dans la mort de son frère, Mickaëlle Paty a saisi le tribunal administratif de Nice, ce mardi 9 juillet.
Quatre ans après l'attentat terroriste qui a coûté la vie à son frère, Mickaëlle Paty se bat toujours pour lui rendre justice. Ce mardi 9 juillet, elle a saisi le tribunal administratif de Nice (Alpes-Maritimes) pour faire reconnaître «la responsabilité de l'Etat dans la survenance de l'attentat contre Samuel Paty».
Mickaëlle Paty avait dans un premier temps formulé cette demande le 15 mars dernier, «dans le cadre d'un recours administratif préalable obligatoire», explique son avocate, Me Carine Chaix, dans le communiqué publié ce mardi.
«Les services du Premier ministre ainsi que les ministères de l'Intérieur et de l'Education» avaient deux mois pour donner suite à cette demande mais «aucune réponse n'est parvenue» dans ce délai. Ce, malgré les «engagements» pris à ce sujet par Nicole Belloubet, ministre de l'Education nationale, et le cabinet du Premier ministre.
Pour l'avocate, ce silence traduit «une décision implicite de rejet» qui a motivé sa cliente à déposer un recours devant le tribunal administratif de Nice. Mickaëlle Paty estime que l'Etat n'a «ni soutenu ni protégé Samuel Paty afin d'éviter que les menaces de mort contre lui soient mises à exécution».
Le communiqué précise que cette procédure vise à rendre justice à Samuel Paty et à sa famille, mais aussi à faire en sorte que l'Etat «tire les leçons» de sa mort, «afin de mieux soutenir le corps enseignant et mieux prévenir les violences au sein des établissements scolaires».
Le «devoir de protection» mis en cause
Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie, a été poignardé puis décapité par un terroriste islamiste le 16 octobre 2020, près du collège où il enseignait, à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines). Une dizaine de jours auparavant, l'enseignant avait donné un cours sur la liberté d'expression à des élèves de 4ème, montrant, pour illustrer son propos, deux caricatures du prophète Mahomet publiées par l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo.
Une élève, alors exclue pour indiscipline, avait prétendu, à tort, avoir assisté à ce cours, racontant à ses proches que le professeur avait demandé aux élèves musulmans de se signaler et de sortir de classe. Le père de l'adolescente, aidé du militant islamiste Abdelhakim Sefrioui, avait alors lancé une virulente campagne contre Samuel Paty sur les réseaux sociaux.
C'est ainsi qu'Abdoullakh Anzorov, un réfugié russe d'origine tchétchène âgé de 18 ans et radicalisé, avait remonté la trace de Samuel Paty. Peu après avoir assassiné l'enseignant, il a été tué par des policiers qui ont retrouvé un message en russe enregistré par l'assaillant avant l'attentat, dans lequel il revendique son acte et se vante d'avoir «vengé le prophète» Mahomet.
Dans son communiqué, Me Carine Chaix affirme que «l’analyse des faits démontre qu’après son cours lors duquel l’enseignant a montré une caricature de Mahomet, et sa décapitation plus d’une semaine plus tard, les services de l’État n’ont pas assuré leur devoir de protection et de soutien envers Samuel Paty malgré les menaces de violences proférées sur les réseaux sociaux, les messages laissés sur le répondeur du collège et les courriels envoyés, les préparatifs de manifestations de la mouvance islamiste devant le collège».