Bruno Garcia-Cruciani a été condamné en appel ce vendredi 27 janvier à la perpétuité pour l'assassinat de son ex-compagne Julie Douib, en mars 2019.
En 2019, 146 femmes ont été tuées par leur compagnon ou ex-compagnon. Parmi elles, il y avait Julie Douib, 34 ans, abattue le 3 mars à l'Ile-Rousse, en Corse, par le père de ses enfants. Suivant les réquisitions, la cour d'assises de Corse-du-Sud a condamné ce vendredi soir en appel Bruno Garcia-Cruciani à la réclusion criminelle à perpétuité.
«La Cour vous condamné à la majorité de huit voix au moins à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une peine de sûreté de 22 ans», a énoncé la présidente au prévenu.
En première instance, en juin 2021, il avait été condamné à cette même peine, avant de faire appel.
«Bruno Garcia-Cruciani n'a pas laissé une seule chance à Julie Douib»
Un peu plus tôt ce vendredi, l'avocate générale Catherine Levy avait requis ce verdict.
«Bruno Garcia-Cruciani n'a pas laissé une seule chance à Julie Douib de s'en sortir», avait-elle argué, rappelant qu'il l'avait «traquée» avant de la tuer par balles le 3 mars 2019. «C'est une exécution pure et simple», avait martelé l'avocate générale, pour qui la préméditation de son acte ne fait aucun doute.
Elle avait également pointé le manque d'empathie du prévenu : «n'importe quel humain demande pardon, exprime des regrets. Là, il n'y a rien».
En première instance, l'assassin de Julie Douib a reconnu s'être rendu armé au domicile de son ex-compagne et lui avoir tiré dessus avant de se rendre aux gendarmes. Il a été jugé coupable d'assassinat, même s'il a toujours nié la préméditation de son acte. Lors de l'instruction, le juge avait notamment souligné le fait que Bruno Garcia-Cruciani avait fait d'étranges recherches sur Internet, telles que «peine pour homicide avec arme» ou encore «partir vivre en Thaïlande».
Sans compter que, selon les enquêteurs, l'intéressé «justifiait totalement son geste et ne manifestait aucun regret» lors de conversations téléphoniques enregistrées durant sa détention. Il précisait en outre avoir «essayé l'arme» du crime avec un silencieux, la veille des faits, dans son jardin où deux étuis de 9 mm ont été retrouvés. La scène a été confirmée par les deux enfants du couple, âgés de 8 et 10 ans au moment du meurtre de leur mère.
Le 3 mars 2019, Bruno Garcia-Cruciani s'était présenté chez son ex-compagne armé d'un Glock 17 et lui avait tiré dessus à trois reprises, l'atteignant deux fois. La première balle l'avait touchée alors qu'elle se trouvait dans la chambre des enfants, la seconde sur le balcon, où elle s'était enfuie. Julie Douib a été mortellement blessée au thorax et au bras gauche.
Elle avait été retrouvée baignant dans son sang par une voisine. «Elle était allongée sur le balcon, la tête dans un pot de fleurs vide. Elle gémissait. A un moment donné, elle m'a regardé et elle m'a dit "il m'a tuée". C'était ses derniers mots», avait raconté cette dernière, émue, lors du premier procès.
Un téléfilm retrace son histoire
A l'époque, le féminicide de Julie Douib avait suscité une émotion particulière, notamment parce que la jeune femme avait tenté d'alerter sur le danger qu'elle encourait. Plusieurs plaintes et mains courantes avaient été déposées au cours des mois précédents par la victime mais aussi par son père, et même par Bruno Garcia-Cruciani. En vain.
Son histoire, tristement emblématique des violences faites aux femmes, a fait l'objet d'un téléfilm diffusé en 2022 : «Elle m'a sauvée». Julie Douib se savait traquée, menacée, et ne cachait pas sa peur à ses proches. «Il est partout, un jour il va me coincer et me mettre une balle», avait-elle dit à son frère, peu avant d'être tuée.
Marlène Schiappa elle-même, alors secrétaire d'Etat à l'Egalité femmes-hommes, avait reconnu que cette mère de famille n'avait «pas été suffisamment protégée». Elle avait à l'époque rencontré des associations et proches de victimes de féminicides, donnant lieu au Grenelle contre les violences conjugales, organisé le 3 septembre 2019.
Ce dernier a débouché sur 46 mesures dont le déploiement de bracelets anti-rapprochement. L'impact du Grenelle est toutefois jugé mitigé par les associations, qui pointent le nombre toujours alarmant de féminicides. Le ministère de l'Intérieur en a enregistré 122 en 2021, ce qui représente une hausse de 20 % par rapport à 2020. Pour l'année 2022, le collectif #NousToutes a dénombré 147 féminicides. Soit un décès tous les deux jours.