Après avoir été condamné mercredi à la réclusion criminelle à perpétuité pour l'assassinat de Julie Douib, Bruno G.-C., l'ex-compagnon de la jeune femme a décidé de faire appel, a-t-on appris ce samedi 19 juin. Ce féminicide avait suscité une forte mobilisation et entraîné l'organisation d'un Grenelle sur les violences faites aux femmes.
A l'issue de sa condamnation, Bruno G.-C., 44 ans, avait été aussi déchu de ses droits parentaux. L'homme avait en effet deux enfants avec la jeune femme tuée. Celui qui comparaissait devant la cour d'assises de Bastia avait reconnu être venu en mars 2019 au domicile de son ex-compagne dont il était séparé depuis septembre 2018, et lui avoir tiré dessus avant de se rendre aux gendarmes.
«Elle m'a simplement dit, "il m'a tuée"», avait confié, lors d'une marche blanche quelques jours après les faits, une voisine qui avait découvert la jeune femme de 34 ans gisant dans son sang sur son balcon : «Ça faisait déjà un mois qu'elle me disait "il va me tuer, il va me tuer", et voilà...».
Plusieurs plaintes et mains courantes avaient été déposées au cours des mois précédents par la victime, son père, mais aussi Bruno G.-C., pour violences, vol, dégradation ou injures non publiques.
«Il y a eu défaillance dans le système, dans le manque d'écoute», avait déploré le père de Julie Douib, Lucien, partie civile avec sa femme Violette. «On a un combat pour les petits-enfants, essayer de les faire revivre et on a le procès qui arrive, notre combat est qu'il paye pour ce qu'il a fait», a-t-il aussi dit en novembre 2019.
Il affirme que son acte n'était pas prémédité
Francesca Seatelli, qui représente les deux fils du couple, également parties civiles, attend «de ce procès que ces enfants aient enfin la place qu'ils méritent dans cette procédure et qu'ils soient enfin entendus en tant que victimes», a-t-elle déclaré.
Selon l'enquête, l’accusé a mené une «traque» de son ex-compagne et, le jour des faits, il s'est présenté chez elle armé d'un pistolet Glock 17 équipé d'un silencieux. Il lui tire alors dessus à trois reprises, l'atteignant deux fois : une première fois dans la chambre des enfants et une seconde fois sur le balcon où elle s'était enfuie, la touchant mortellement au thorax et au bras gauche.
Il affirme que son acte n'était pas prémédité mais l'accusation assure le contraire : Bruno G.-C. avait fait des recherches sur internet avec les mots-clés «peine pour homicide avec arme» et «partir vivre en Thaïlande». «Moi aussi, je vais bientôt rejoindre ton beau-frère à Borgo», l'une des deux prisons de Haute-Corse, avait-il aussi déclaré à une connaissance la veille des faits.
Pendant sa détention, l'accusé a pu se servir d'un téléphone et dans les conversations enregistrées, «il justifiait totalement son geste et ne manifestait aucun regret», selon les enquêteurs. Il précisait aussi avoir «essayé l'arme, avec le silencieux», la veille des faits dans son jardin où deux étuis de 9 mm ont été retrouvés, une scène confirmée par les enfants du couple.
Ce 30e féminicide sur les 146 dénombrés en 2019 avait suscité une vive émotion: «Elle n'a pas été suffisamment protégée», s'était emportée Marlène Schiappa, alors secrétaire d’État à l’Égalité hommes-femmes. Elle recevra ensuite des associations et proches de victimes de féminicides lui réclamant un Grenelle contre les violences conjugales.
Organisé le 3 septembre 2019, le Grenelle a débouché sur 46 mesures dont le déploiement de bracelets anti-rapprochement. Son effet est jugé mitigé par les associations qui regrettent un nombre de féminicides toujours alarmant avec 90 cas en 2020.
Deux autres personnes, le compagnon de la sœur de Bruno G.-C. et un ami proche, ont été mises en examen pour «destruction de documents ou objets concernant un crime ou délit pour faire obstacle à la manifestation de la vérité"» et renvoyées devant le tribunal correctionnel de Bastia.
Ils ont reconnu avoir détruit un sac que Bruno G.-C. avait confié à une tierce personne avant son acte. Il contenait des affaires de Julie Douib, un ordinateur et deux téléphones portables.
Il décide de faire appel
Ce samedi 19 juin, M. Fagni a confirmé que «M. G.-C. a formé un appel contre toutes les dispositions de l'arrêt, à la fois l'arrêt pénal qui le condamne à la perpétuité avec 22 ans de sûreté, mais aussi contre les dispositions annexes comme la perte de l'autorité parentale». Une décision qui n'a pas surpris la famille de la victime, qui en a été informée la veille, comme l'a expliqué leur avocat à l'AFP, M. Jean Sébastien De Casalta.