Depuis une vingtaine d’années, des experts militent pour la création d’un équivalent aux organismes intergouvernementaux du climat (GIEC) et de la biodiversité (IPBES). Jusqu'au 21 juin, un groupe de travail se réunit autour de la future instance qui se heurte à quelques blocages.
Un nouvel organisme verra-t-il le jour ? Depuis plus d’une vingtaine d’années, la communauté scientifique souhaite la création d’une entité intergouvernementale pour la pollution chimique équivalente au GIEC pour le climat, ou l’IPBES pour la biodiversité. C’est pour cette raison qu’un groupe de travail constitué de politiques, entreprises ou encore de parties civiles venues de plus de 100 pays se réunit en Suisse jusqu'au 21 juin.
Par pollution chimique, les experts entendent un rejet de produits à la fois d’origine industrielle et domestique. Selon le «Chemical Abstracts Service» (CAS), il existe depuis les années 1.800, 219 millions de références chimiques dans le registre de l’entité. Environ 40.000 à 60.000 produits chimiques industriels seraient commercialisés dans le monde, dont 6.000 représentent plus de 99% du volume total.
Selon l’ONU, la pollution chimique représente la troisième crise environnementale que subit la Terre aux côtés du réchauffement climatique et du déclin de la biodiversité qu’elle alimente. Pour la santé, les polluants chimiques peuvent entraîner des troubles cognitifs, de l’infertilité ou encore des troubles cardio-respiratoires et un déficit immunitaire.
Des blocages
D’après un rapport de la Commission Lancet, la pollution de l’air, de l’eau et du sol provoque environ 9 millions de décès prématurés dans le monde par an et 92% de ces morts concerne les pays à faible et moyen revenus.
Malgré l’étendue du problème, les scientifiques regrettent un manque de considération de ce dernier. À titre d’exemple, l’Agence européenne des produits chimiques (Echa) a démontré en décembre 2023 que près de 20% des 2.400 produits contrôlés dans 26 pays de l’Union européenne ne respectent pas la réglementation.
Dans un entretien accordé à Novethic, Lucien Chabason, conseiller de la direction à l’Institut du Développement Durable et des Relations Internationales (Iddri) a expliqué que le projet peine à être mis en place en raison de conflits d’intérêts. «Ce n’est pas problématique d’un point de vue politique comme peut l’être le traité mondial sur la pollution plastique. Ici, l’idée de créer un 'Giec' de la chimie a déjà été actée. Il s’agit désormais de se mettre d’accord sur la mécanique à mettre en place», a-t-il indiqué. «Il y a notamment un problème de conflit d’intérêts très important dans ce domaine. L’industrie chimique a un rôle clé et dispose d’une expertise énorme qu’elle peut avoir tendance à imposer…», a-t-il estimé.
Les experts espèrent voir la création de ce «GIEC», dédié à la pollution chimique, d’ici à la fin 2024.