Une étude britannique, publiée lundi 23 octobre, alerte sur l'accélération jugée inévitable de la fonte des glaces en Antarctique occidental. Cela pourrait conduire à une hausse de plus de 5 mètres du niveau des mers.
L'humanité a peut être «perdu le contrôle» de la fonte des glaces en Antarctique occidental. Dans une étude publiée lundi 23 octobre dans la revue Nature Climate Change, les chercheurs du British Antarctic Survey assurent qu'une fonte plus rapide des plate-formes glaciaires est inéluctable dans les prochaines décennies. Elle pourrait augmenter le niveau des mers d'environ 5 mètres si la totalité de la calotte est perdue.
Leur alerte concerne les gigantesques structures gelées flottant en marge de l'inlandsis principal dans la mer d'Amundsen. Elles jouent un rôle stabilisateur en retenant la dérive et la fonte des glaciers dans l'océan.
L'Antarctique a déjà connu une perte de glace accélérée ces dernières décennies et, selon cette étude, la calotte glaciaire de l'Antarctique occidental pourrait s'approcher d'un «point de bascule».
We’ve spent the last few years modelling the future of the Amundsen Sea in West Antarctica, and I regret to inform you that it’s not good news. https://t.co/h0i8ffIWN9
— Dr Kaitlin Naughten (@kaitlinnaughten) October 23, 2023
Au point que l'accélération de la fonte des glaces annoncée aura lieu même si le monde respecte ses engagements pour limiter le réchauffement climatique. A l'aide d'une modélisation informatique, les chercheurs ont réalisé qu'un scénario positif, intégrant des émissions de gaz à effet de serre (GES) réduites, ne changeait pas vraiment leurs résultats.
Ce, y compris avec un réchauffement qui resterait dans les limites de l'objectif le plus ambitieux de l'accord de Paris, à savoir 1,5 degrés Celsius par rapport à l'ère préindustrielle. D'après les scientifiques du British Antarctic Survey, le réchauffement des océans pourrait s'avérer trois fois plus rapide au XXIe siècle qu'au XXe siècle, même dans le meilleur des cas.
Cela ne signifie pas qu'il faut abandonner les efforts visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Si une réduction majeure ne sauvera sans doute pas la calotte glaciaire de l'Antarctique occidental au cours de ce siècle, elle pourrait néanmoins avoir un impact important à plus long terme, sachant que le rythme de cet effondrement reste incertain. Il pourrait se produire en plusieurs décennies, voire en plusieurs siècles.
En tant que professeur d'océanographie physique à l'Université de Southampton, Alberto Naveira Garabato ajoute que la réducation des GES pourrait permettre de préserver la calotte glaciaire de l'Antarctique oriental, actuellement considérée comme plus stable.
Les habitants des zones côtières menacés
Quoi qu'il en soit, il y a «toutes les raisons de s'attendre» à ce que la fonte des glaces contribue à l'élévation du niveau de la mer, affirme Kaitlin Naughten, auteure principale de l'étude. Une hausse d'un mètre pourrait déjà être enregistrée d'ici à la fin du siècle.
Ce ne sera évidemment pas sans conséquence, puisque des millions de personnes à travers la planète vivent actuellement dans des zones côtières de faible altitude et certaines «communautés côtières devront soit construire aux alentours, soit être abandonnées», explique la chercheuse.
Auprès du Guardian, Kaitlin Naughten s'alarme : «Nous sommes déjà confrontés à une crise des réfugiés dans le monde, et [l’élévation du niveau de la mer] ne fera qu’aggraver la situation. Comment allons-nous faire face au déplacement de millions de personnes, voire de plus d’un milliard, en fonction de l’ampleur de l’élévation du niveau de la mer ?».
Sans discrediter le travail des chercheurs du British Antarctic Survey, Jonathan Bamber, professeur à l'école des sciences géographiques de l'Université de Bristol, a toutefois jugé l'étude limitée. Il pointe notamment le fait que les scientifiques n'ont utilisé qu'un seule modèle océanique et n'ont pas explicitement étudié l'effet du réchauffement des eaux sur le niveau des mers.
Néanmoins, sachant que «cette partie de l'Antarctique occidental contient suffisamment de glace pour faire monter le niveau de la mer de plus d'un mètre», il reste convaincu qu'il est important de comprendre comment évoluera cette région à l'avenir.