Hautement inflammable, l’eucalyptus est largement décrié au Portugal à cause des nombreux incendies dont il a été à l'origine ces dernières années. L’arbre importé d’Australie occupe pourtant une place majeure dans l’économie portugaise en raison de sa forte rentabilité.
Il est le coupable idéal des feux de forêts à répétition touchant le Portugal. Hautement inflammable, l’eucalyptus est largement décrié au pays des Œillets à cause des nombreux incendies dont il a été à l'origine ces dernières années. La surexploitation de cet arbre facilite les départs de feux dans l’un des pays européens les plus souvent ravagés par les flammes.
L’arbre, importé d’Australie et planté en rangs sur plusieurs hectares pour fabriquer du papier, a remplacé 26% de la forêt portugaise. En 2017, un incendie dans le centre du pays avait coûté la vie à 66 personnes. La forêt touchée à cette époque était composée de pins maritimes et d’eucalyptus.
«Le pin maritime, quand il brûle, peut projeter ses pommes de pin à 500 mètres. Mais l’eucalyptus envoie des feuilles, des morceaux d’écorce, à plusieurs kilomètres. Quand il y a plusieurs départs de feu, on pense parfois que c’est un pyromane qui a incendié plusieurs endroits. En pratique, ce sont des incendies secondaires causés par la combustion de l’eucalyptus», analyse Paulo Castro, ingénieur forestier, pour Radio France.
Un arbre particulièrement rentable au Portugal
S’il est décrié, l’eucalyptus est pourtant largement répandu au Portugal en raison de son impact sur l’économie et de la forte demande qu’il suscite à travers le monde.
«L’eucalyptus, c’est le plus rentable. Les gens sont tellement contre, mais pouvez-vous me dire quel était le produit que tout le monde mettait dans son caddie quand la pandémie a commencé ? Du papier toilette. Comment on pourrait fabriquer tout ce papier sans eucalyptus ? Les boîtes de médicaments aussi ? C’est impossible de vivre sans ou presque !», décrypte la productrice de bois Sandra Carvalho pour la radio généraliste.
Son impact écologique est ainsi contrebalancé par son poids économique. Au Portugal, l’industrie du bois génère des milliards d’euros et des milliers d’emplois. L’eucalyptus, produit phare de cette industrie, est utilisé pour la fabrication du papier, mais aussi de couches ou encore de mouchoirs.
«La question de l’environnement nous préoccupe bien sûr. Nous le savons. Mais la vérité, c’est que les entreprises du bois créent de nombreux emplois et de la richesse. C’est un secteur qui progresse », confie Mario Matos, leader syndical CGTP dans l’industrie du bois, auprès de la radio publique.
Les forêts d’eucalyptus en manque d'entretien
L’incendie de 2017 a poussé de nombreux habitants des zones sinistrées à déserter leur habitation. Le problème étant que de nombreux Portugais ont planté de l’eucalyptus sur leurs parcelles il y a plusieurs décennies afin de compléter leurs revenus en le revendant. Les terrains, appartenant jadis à des particuliers qui ont aujourd’hui choisi de s’installer ailleurs, alimentent les flammes en cas d’incendies dans les forêts à proximité.
Un véritable problème de fond se pose alors au Portugal en raison des ravages causés par les flammes ces dernières années. «C’est lié à notre politique forestière depuis trente ans : deux tiers des forêts d’eucalyptus sont aujourd’hui mal gérés ou abandonnés», explique Paulo Castro.
Le Parlement portugais a récemment interdit l’expansion des cultures d’eucalyptus au Portugal. «La loi est une chose, son application en est une autre. Il n’y a pas de contrôle de la part des autorités», regrette l’ingénieur forestier.
Ce mardi, Porto accueillait la huitième conférence internationale sur les feux de forêts afin d’endiguer ce fléau écologique, humain et écologique.