L'un des méga-courants océaniques qui permet la survie de nos océans ralentit et pourrait s’interrompre d’ici à 2300 en raison du réchauffement climatique, révèle une étude publiée dans la revue Nature Climate Change. Si un tel événement se produisait, les conséquences pour la planète seraient désastreuses.
Une menace sous-marine. La circulation océanique profonde, aussi appelée circulation thermohaline, est composée de plusieurs méga-courants qui la régulent. Ces derniers résultent des différences de température et de salinité entre les masses d’eau et sont absolument indispensables pour la survie de nos océans, et de notre planète.
Des scientifiques ont démontré que le réchauffement climatique ralentit notamment l’un d’entre eux appelé «circulation méridienne de retournement australe» (SMOC en anglais), qui pourrait même s’interrompre d’ici à 2300 et provoquer une catastrophe écologique.
Si plusieurs études scientifiques avaient déjà alerté quant au ralentissement de la circulation méridienne de retournement atlantique (AMOC en anglais), une nouvelle étude publiée le mois dernier dans la revue Nature Climate Change tire cette fois la sonnette d’alarme quant aux «signes majeurs et inquiétants de ralentissement provoqué par le réchauffement de l’eau avec le climat», concernant un autre des principaux méga-courants : la circulation méridienne de retournement australe (SMOC), jusqu’alors moins bien étudiée que sa jumelle du nord.
Un désastre similaire à la fonte des calottes glaciaires
Des scientifiques de l'université de Californie à Irvine ont conclu que dans le pire scénario de réchauffement global, la SMOC pourrait s'interrompre totalement d'ici au 24e siècle. Plus proche de nous en termes d'horizon temporel, les deux courants (AMOC et SMOC) risquent de ralentir de 42 % dès la fin de notre siècle, affirment les chercheurs après avoir analysé les projections climatiques issues d'une trentaine de modèles de prévision.
«Cela signifierait un désastre climatique d'ampleur similaire à la fonte de l'ensemble des calottes glaciaires terrestres», résume l'océanographe J. Keith Moore, professeur associé à l'Université de Californie à Irvine et co-auteur de l'étude, cité dans un communiqué.
Moins de captation du CO2
Si ce processus de ralentissement se poursuit, la capacité des océans à capter et à stocker le carbone provenant de l'atmosphère (en excès dans l'air à cause des activités humaines) pourrait s'amoindrir considérablement, alertent les chercheurs californiens.
En effet, l'interaction de l'eau de mer avec l'air entraîne la solubilisation du CO2. Le carbone dissous dans l'eau est ensuite utilisé en partie par des microorganismes marins comme le plancton, notamment pour synthétiser leur coquille. Ces animaux se nourrissent des êtres vivants plus petits, et leur carcasse finit par sombrer au fond des mers, immobilisant le carbone pour plusieurs milliers d'années.
Or, «une disruption de la circulation océanique réduirait l'absorption de CO2 atmosphérique par l'océan, aggravant par conséquent le réchauffement climatique», explique le professeur Moore. «Avec le temps, les nutriments qui sont à la base des écosystèmes marins se retrouveraient de plus en plus piégés en profondeur, conduisant à une chute de la productivité biologique globale».
Réduire les émissions de gaz à effet de serre
Quelques jours après cette publication, une autre étude avait également souligné le risque d'affaiblissement du «puits de carbone» à long terme de l'océan, mais cette fois en raison d'un autre paramètre : l'activité biologique des microorganismes marins, notamment des bactéries. Les deux processus pourraient donc se conjuguer, faisant de l'océan une pompe à carbone d'autant moins efficace.
Toutefois, les auteurs de l'étude dans Nature Climate Change veulent garder espoir. «Notre analyse montre que réduire aujourd'hui nos émissions de gaz à effet de serre peut empêcher cet effondrement de la circulation océanique profonde dans le futur», soulignent-ils. Une démarche encore beaucoup trop prise à la légère par les pays les plus pollueurs de la planète.