A travers les siècles, les Peugeot ont su s’adapter aux bouleversements de leur époque et faire de la modeste entreprise familiale des débuts, lancée au XVIIIe siècle par un meunier franc-comtois, un consortium présent partout à travers le monde. Une réussite qui doit beaucoup à la figure de l’un des représentants de la dynastie, Armand, qui le premier pressentit la révolution automobile.
Archives – Article publié le mercredi 14 mai 2008
Quel est le point commun entre la tour Eiffel et les automobiles Peugeot? Outre le fait que ce sont deux symboles de la renommée de la France à l’étranger, tous deux doivent aussi leur existence à l’Exposition universelle de 1889. C’est en effet dans les allées de la Galerie des Machines qu’Armand Peugeot (1849-1915), ingénieur centralien et héritier d’une longue lignée d’artisans et de manufacturiers, a l’intuition de sa vie.
Alors qu’il expose un modèle de tricycle doté d’un moteur à vapeur, qui ne suscite pas de réel intérêt de la part du public, ce visionnaire découvre dans les allées de l’exposition les premiers moteurs «à essence de pétrole», mis au point par Gottlieb Daimler, et comprend que l’avenir de l’automobile réside dans cette invention. La prémonition d’Armand Peugeot est déterminante : sous son impulsion, l’entreprise familiale amorce un virage industriel depuis son fief franc-comtois.
Une longue tradition
Les racines de la famille Peugeot remontent au XVe siècle, mais la société Peugeot a été fondée au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle par Jean-Pierre Peugeot, sous une forme juridique plus proche de la manufacture de l’Ancien Régime que de la société anonyme actuelle. En 1810, les deux fils aînés du fondateur s’associent à un autre héritier d’une riche famille d’industriels pour créer l’entreprise Peugeot-Frères et J. Maillard- Salins. Au cours des années, elle développera différentes activités, depuis la teinturerie et la minoterie originelles jusqu’à la mécanique de précision en passant par la fonderie.
Deux arrière-petits-fils du fondateur, Eugène et Armand, donnent un nouveau tour à la société Peugeot frères aînés à partir de 1865. Ce sont eux qui métamorphosent cette modeste compagnie familiale. A l’issue de ses études à l’Ecole centrale de Paris, Armand Peugeot part en Angleterre, berceau de la révolution industrielle. Il en revient conquis par la bicyclette, et malgré les réticences de son cousin Eugène, obtient d’en entamer la production dans les usines de la firme.
Vidéo : Peugeot, la griffe d’un constructeur
Rapidement, il dote ses engins à roues d’un moteur. Après les déboires du tricycle à vapeur, Armand mise tout sur le moteur à essence. En 1891, le premier quadricycle Peugeot à moteur à explosion s’élance sur les routes et rallie l’usine de Valentigney (dans le Doubs) à Brest, à une moyenne de 14 km/h. Une véritable performance pour l’époque, qui assure une belle renommée au constructeur automobile naissant.
Malgré cela, Eugène Peugeot ne croit toujours pas à l’avenir de l’automobile et demeure hostile à l’idée d’en faire l’activité principale de l’entreprise. A la fin de 1895, le conflit est consommé. Armand quitte l’entreprise familiale avec ses brevets. Il crée en 1896 la Société des Automobiles Peugeot et rompt son association avec Daimler pour produire ses propres moteurs. Le succès est au rendez-vous : en 1897, Armand Peugeot vend 54 voitures, le triple l’année suivante, et plus de 500 en 1900. De son côté, le cousin sceptique, Eugène, prend conscience de son erreur et reprend la production de quadricycles à moteur sous la marque Lion-Peugeot. Dans le même temps il cède peu à peu la main à ses trois fils, qui amorcent avec leur oncle un rapprochement devenu effectif en 1910, trois ans après la mort d’Eugène.
Naissance d’un géant
Le groupe né de la réunion des deux constructeurs prend le nom de Société Anonyme des Automobiles et des Cycles Peugeot. Dès lors, l’automobile devient son produit phare, même si l’entreprise fabrique et vend d’autres produits (notamment des scooters et des … moulins de cuisine). Depuis le règne décisif d’Armand et Eugène, trois générations de Peugeot se sont succédé à la tête du consortium familial, jusqu’en 1965 et la constitution de l’entité PSA sous sa forme actuelle. Devenu un fleuron de l’industrie française et un motif de fierté nationale, Peugeot a pris place dans les familles françaises avant de partir à la conquête du monde. En fonction des générations, on se souvient de la 202 d’avant-guerre, de la mythique 404 (la «Pigeot») des sixties, de l’ultra-pratique 205 des années 1980.
Vidéo : Caméra embarquée avec Sébastien Loeb dans Peugeot Pikes PEak
« Se sont des industriels, non des financiers »
Selon Alain Frerejean, auteur du livre «Les Peugeot : deux siècles d’aventure», « trois éléments peuvent expliquer la réussite et la longévité de l’entreprise familiale Peugeot. D’une part, ses valeurs traditionnelles : les Peugeot sont des protestants luthériens de province. A ce titre, ils ont cherché, à travers les époques, autant à développer le patrimoine de la famille en vue de le transmettre aux héritiers, qu’à assurer la pérennité de l’emploi dans leur bassin d’implantation local. D’autre part, ils ont toujours cherché à éviter les conflits internes à la famille et les guerres de succession. Ils ont longuement médité les erreurs d’autres dynasties, comme les Japy par exemple, qui à force de dissensions, ont laissé se disperser le capital de leur entreprise. Enfin, les Peugeot se sont distingués par une gestion prudente : ce sont des industriels, non des financiers. Ils ont également conscience de leurs limites et ont fini par admettre que le génie ne se transmet pas de père en fils pendant plusieurs générations. Ainsi, la décision de confier la direction du groupe à quelqu’un qui ne faisait pas partie du sérail, en 1965, a été bénéfique au groupe, dans un contexte de concurrence mondiale et de nouvelles technologies.»
Concept cars : les voitures du futur exposées aux Invalides
L’usine PSA d’Aulnay acte sa propre fermeture
Leob et Peugeot pulvérisent le record de Pikes Peak