Le Festival de Cannes est désormais bel et bien lancé, et sa première journée a donné lieu, déjà, aux premières émotions cinématographiques, laissant augurer une belle quinzaine pour cette 77e édition.
Les débats sont ouverts. Hier, mardi 14 mai, à midi, la Croisette fourmillait déjà de cinéphiles, d'artistes, de badauds et de visiteurs venus des quatre coins du monde, venus assister à l'arrivée de l'équipe du «Deuxième Acte» de Quentin Dupieux (actuellement à l'affiche) avec Léa Seydoux, Vincent Lindon, Raphaël Quenard et Louis Garrel. Une comédie loufoque et singulièrement barrée sur une équipe de comédiens en roue libre, dirigés par... l'Intelligence Artificielle. Est-on dans la vraie vie ou dans la fiction ?
Le film, toujours aussi court, ne vaut pas «Yannick», précédent opus du plus prolifique cinéaste français du moment : le temps se fige parfois, et le rythme n'est pas toujours à la hauteur de la formidable idée de départ. Qu'importe, les séquences caustiques, acides - et où l'autodérision s'impose - secouent joyeusement notre zone de confort cinéphile.
Un ultime film porté par Agnès Jaoui
En échos aux interrogations du personnage qu'elle incarne dans le film de Dupieux, Léa Seydoux nous confiait qu'elle se pose parfois la question de ce que représente «le métier d'actrice». «Est-ce vraiment un métier?», s'interrogeait-elle, avouant que, «quoi qu'il en soit», elle n'avait «pas envisagé de plan B'» pour une autre voie professionnelle. Plus tôt dans la matinée, à La Quinzaine des Cinéastes, un beau moment d'émotion nous attendait.
La découverte du dernier film de la regrettée Sophie Fillières disparue récemment, «Ma vie Ma gueule», portée par une magnifique Agnès Jaoui, dépeint les déboires d'une quinquagénaire dépressive, peu heureuse mais souvent joyeuse, assez esseulée et pourtant en contact permanent avec son entourage (amis, personnel médical, inconnus, psy et même l'artiste Philippe Katerine). Comment survivre émotionnellement quand on est à la dérive ? Vers qui ou vers quoi se raccrocher, se rapprocher, se réinventer ? Sophie Fillières, toujours inclassable et profondément humaine dans son approche, met toute la lumière sur le personnage d'Agnès Jaoui, vaillante héroïne qui vacille mais ne sombre pas.
Au sortir de la projection, la comédienne, accompagnée des enfants de la cinéaste (Adam et Agathe Bonitzer qui ont assuré le montage et la post-production du film), ont témoigné de cette belle aventure, forcément triste mais pas désespérée, et qui a réussi le défi de dépasser la disparition physique en faisant aboutir une œuvre réelle, aujourd'hui proposée au public (sortie 18 septembre).