On observe une baisse durable de la consommation d'alcool chez les Français depuis plusieurs années, et chez les jeunes en particulier.
Entre 1960 et 2022, l'Insee constate une baisse significative de la consommation d’alcool en France. Il y a soixante ans, un Français buvait en moyenne 200 litres d’alcool par an. Aujourd'hui, il n'en boit plus que 80. Malgré un affaissement particulièrement marqué dans les années 1960 et jusqu'à la fin des années 1990, la tendance semble donc se poursuivre. Les chiffres des jeunes générations en sont un marqueur significatif, et de plus en plus d’adolescents assument haut et fort ne pas goûter aux plaisirs de la boisson.
Pour se faire une idée précise du tableau général dans l’Hexagone, une enquête est menée chaque année auprès de 22.000 jeunes de 17 ans, lors de leur Journée défense et citoyenneté (ESCAPAD). Cette étude montre une augmentation significative du nombre d'adolescents n'ayant jamais bu d'alcool depuis le début des années 2000, passant de 4,4% en 2002 à 19,4% en 2022.
Néanmoins, l’OFDT précise que les boissons alcoolisées demeurent «les substances les plus répandues à l’adolescence, (…) avec près de 4 millions d’expérimentateurs avant l’âge légal d’accès».
une consommation festive
Comme on peut s'y attendre, le contexte de crise sanitaire des années 2020 a accéléré un mouvement de désociabilisation déjà à l'oeuvre depuis plusieurs années et a, par là même, incité les jeunes à moins consommer ensemble. «Chez les ados, l’alcool reste une consommation festive, de groupe. La pandémie a mis un frein à ces activités mais, plus globalement, le temps passé devant les écrans augmente depuis les années 2010, ce qui bouleverse les modes de sociabilité», explique ainsi l’épistémologiste Maria Melchior, directrice de recherche à l’Inserm.
culte du «Corps Parfait»
Ce rejet de l'alcool est pourtant à double tranchant, dans la mesure où il serait lié non seulement à des enjeux de santé mais également à des injonctions relatives au «culte du corps parfait et de la performance». Pour le dire simplement, il s’agirait plus d’entretenir une «image de soi», un capital beauté, notamment sur les réseaux sociaux, plutôt que de réellement préserver sa santé.
différences sociologiques
Par ailleurs, il existe des différences sociologiques importantes en matière de consommation d’alcool. Ainsi, les adolescents n’ayant jamais bu d’alcool sont plus souvent les filles (15,4 % contre 13,4 % des garçons). Cette différence s’explique par une plus grande tolérance des comportements à risque chez les garçons, l'alcoolisation pouvant même être valorisée et vue comme un rite de passage à l'âge viril. La descente cul-sec, et filmée, d’une bière par le Président de la République le 17 juin dernier en est un témoignage actuel.
Concernant les écarts d’âge, s’il est vrai que les jeunes boivent moins souvent, ils boivent aussi en plus grande quantité. En effet, selon Santé publique France, les comportements d’«alcoolisation ponctuelle importante» (API), plus connus sous l’appellation anglophone «binge drinking», soit le fait de boire l’équivalent de cinq verres d’alcool ou plus en une même occasion, sont plus répandus chez les jeunes. A l’inverse, les personnes de plus de 50 ans ont tendance à boire de l’alcool plus fréquemment, voire quotidiennement, mais en plus petite quantité.