A Los Angeles, dans son salon de coiffure mobile du nom de Project Q, Madin Lopez coupe gratuitement les cheveux des jeunes sans-abri noirs qui se considèrent non binaires : ni tout à fait homme, ni tout à fait femme.
Pour les queer afro-américains, trouver un coiffeur qui connaisse leur texture capillaire et qui les comprenne relève du défi : beaucoup refusent de s'occuper de quelqu'un qu'ils n'arrivent pas à cerner ou ne savent pas comment faire. Sans parler du coût rédhibitoire pour les jeunes sans-abri d'une coupe sophistiquée comme celle que souhaite Nova, une sans abris non binaire : l'addition peut atteindre sept-cent dollars.
Les queer demandent à être qualifiés par des pronoms ou articles pluriels ou neutre (comme «ils», «iel», «ael», ...) pour refléter cette double appartenance masculine et féminine.
Madin, 31 ans, le fait gratuitement pour aider ces jeunes dans lesquels il se reconnait. Quand il avait treize ans, ses parents l'ont battu(e), ne supportant pas son identité queer.
Des jeunes rejetés par leurs familles
La coiffure est perçue par Madin comme du militantisme face aux discriminations dont font l'objet les jeunes homosexuels, bisexuels, transgenres ou queer (LGBTQ+) aux Etats-Unis. D'après lui, malgré la légalisation du mariage homosexuel, la vie reste difficile pour eux : «On se bat encore pour pouvoir utiliser des toilettes qui correspondent à notre identité sexuelle».
Quand Madin a épousé une jeune femme, «mon père m'a dit au téléphone "tu iras en enfer, je ne veux plus jamais te voir"», déplore-t-il. Beaucoup de jeunes «non binaires» rejetés par leur famille finissent dans la rue, d'autant plus que la Californie traverse une grave crise du logement. Alors pour Nova, le salon de coiffure de Madin est un refuge, un lieu presque thérapeutique : «Iel comprend ce que je traverse. Iel sauve des vies».