Une vaste étude réalisée conjointement par l’Insee et l’Institut national d’études démographiques (Ined), rendue publique mardi 5 juillet, a permis d’établir les trajectoires familiales, scolaires et professionnelles de trois générations d’immigrés. Elle révèle notamment qu'en France un tiers de la population de moins de 60 ans a des origines étrangères.
L’Histoire et les différentes dynamiques migratoires ont façonné la diversité de la population hexagonale.
D’après l’enquête statistique Trajectoire et Origines, menée par l’Insee en partenariat avec l'Ined et publiée mardi 5 juillet, 21 % de la population française est liée à l'immigration : 9 % est immigrée (5,8 millions de personnes) et 12 % est descendante directe d'immigré (7,5 millions).
En outre, 10 % des moins de 60 ans sont des petits-enfants d'immigrés (4,7 millions). Au total, un tiers des personnes de moins de 60 ans (32 %) ont ainsi un lien avec l’immigration sur trois générations.
Autre enseignement, l'enquête relève la fréquence des unions mixtes, en particulier dans la deuxième génération. «A la seconde génération, une personne sur deux est issue d’un couple mixte, elle a un parent immigré et un qui ne l’est pas», a confirmé Jérôme Lê, chef de la cellule études et statistiques sur l’immigration à l’Insee. En effet, à la seconde génération 34 % de personnes venues de l’étranger vivent avec un autre immigré, contre 63 % à la première génération.
Les origines migratoires s’estompent un peu plus encore à la troisième génération où sur dix petits-enfants d’immigrés, neuf n’ont qu’un seul ou deux grands parents immigrés.
Une diversification des origines
D’après l’Insee «l’empreinte de la succession des flux d’immigration se lit plus nettement dans les origines géographiques par âge». Et pour cause, si les immigrés venus d’Afrique sont majoritaires entre 18 et 58 ans, ils redeviennent une minorité au-delà de 60 ans, au profit d’immigrés originaires d’Europe.
Les vagues migratoires en provenance d’Espagne et d’Italie ont précédé celles du Maghreb et du Portugal, puis, plus récemment celles d'Asie et des autres pays africains.
Une deuxième étude issue de la même enquête a cherché à mesurer la progression du niveau d'éducation sur trois générations des personnes issues de l'immigration. Elle porte sur les 30-59 ans titulaire d'une diplôme de bac+2 et plus. Les enfants de couples mixtes et les petits-enfants d'immigrés ont aussi souvent un diplôme du supérieur que «les descendants de natifs».
C'est moins le cas des enfants de deux parents d'immigrés, car leurs parents avaient au départ un niveau d'étude plus bas. En revanche, les diplômés du supérieur nés de parents d'origine extra-européenne ont plus de difficulté à accéder à des professions intermédiaires ou supérieures : 77% pour les enfants de natifs, contre 63 % pour ceux dont les parents viennent du Maghreb, 67 % d'Asie et 71 % d'Afrique.
Le nombre de personnes en France déclarant avoir subi des discriminations a augmenté de 14 % à 19 % par rapport à la dernière enquête parue il y a onze ans, indiquent l'Insee et l'Ined. Le premier motif de discrimination est l'origine (nationalité ou couleur de peau) pour 8 % d'entre elles, mais le sexe est devenu le premier motif de discrimination pour les femmes (10 %)
Considérée comme incompatible avec le modèle républicain, la production de statistiques ethniques est strictement encadrée en France où l’on ne distingue pas les individus en fonction de la couleur de peau ou de leurs origines. Toutefois cette enquête bat en brèche certaines idées reçues dans un pays où 7,5 millions de personnes sont issues de l’immigration.