Les arrestations au Belarus de jeunes contestataires du régime du président Alexandre Loukachenko, qui s'expriment sur l'internet et les réseaux sociaux, se sont multipliées à l'approche des élections législatives de dimanche, selon des militants de l'opposition.
L'adolescent Roman Protassevitch raconte ainsi avoir été arrêté et battu fin août par des policiers en civil, alors qu'il n'appartient à aucun de ces mouvements d'opposition contre lesquels la répression s'est accrue après la réélection controversée de M. Loukachenko fin 2010.
"Les policiers m'ont frappé aux reins et au foie, après j'ai uriné du sang pendant trois jours. Ils ont menacé de m'accuser de meurtres non élucidés", a déclaré à l'AFP l'adolescent.
M. Protassevitch dirige sur le réseau social VKontakte deux sites contestataires dont l'un baptisé "Nous sommes fatigués de Loukachenko", qui appelle à boycotter les législatives comme l'ont fait aussi de grands partis d'opposition.
Roman Protassevitch a été relâché par la police après quelques heures d'interrogatoire car il est mineur: âgé de 17 ans, il est né un an après l'arrivée d'Alexandre Loukachenko à la tête de cette ancienne république soviétique en 1994.
L'un de ses amis, Sergueï Bespalov, administrateur du site "Nous sommes fatigués de Loukachenko", s'est enfui en Pologne et un autre collaborateur du site, Oleg Chramouk, a cessé ses activités sous pression de la police.
Outre M. Protassevitch, les autorités ont interpellé d'autres jeunes ces derniers mois.
"Les jeunes, dont les actions s'inpirent de l'expérience des révolutions du Printemps arabe au moyen d'internet, sont considérés comme le danger principal par le régime", explique l'analyste politique Alexeï Korol.
"C'est le résultat de la peur"
La plupart des anciens rivaux de Loukachenko à la présidentielle de 2010 ne peuvent pas se présenter aux élections en raison de leur condamnation après les manifestations qui ont suivi le scrutin présidentiel de 2010.
L'un deux, Nikolaï Statkevitch, purge actuellement une peine de six ans de prison.
Un autre ex-candidat, Andreï Sannikov, condamné à une peine de prison ferme puis libéré après avoir affirmé être torturé en détention, est sous traitement médical et ne se présente pas aux législatives.
"La répression a contraint certaines personnes à émigrer et d'autres à se tenir à l'écart des groupes d'opposition", déclare à l'AFP le chef du Parti civique uni, Anatoli Lebedko, qui a lui aussi passé cinq mois en détention.
"Peu de gens rejoignent l'opposition. C'est le résultat de la peur semée par le régime dans la société bélarusse", dit-il.
Après l'affaiblissement de l'opposition politique traditionnelle au Bélarus, les autorités ont réduit au silence d'autres voix dissidentes dans le pays et accentué la pression contre les jeunes militants actifs sur l'internet, selon des experts.
Le leader du groupe d'opposition Front de la Jeunesse, Dmitri Dachkevitch, 31 ans, condamné en 2010 à deux ans de prison, a vu en août sa peine allongée d'un an pour désobéissance aux autorités carcérales.
"Il purge presque la moitié de sa peine pour avoir refusé de céder à l'administration qui exige de lui qu'il reconnaisse sa culpabilité", a déclaré à l'AFP l'épouse du condamné, Nastia Polojanko.
"La situation dans le pays a changé maintenant. Tous ces généraux du KGB savent très bien que le militantisme des jeunes peut s'avérer destructeur pour le régime", estime l'avocat et défenseur de droits de l'Homme Valentin Stefanovitch.