Un témoignage pour le moins poignant et glaçant. Témoin du meurtre de Federico Martin Aramburu, tué par balles le 19 mars dernier, un homme est revenu, ce mercredi dans L’Equipe, sur la bagarre qui a entraîné la mort de l’ancien rugbyman à l’âge de 42 ans.
Le drame est survenu au petit matin dans les rues du 6e arrondissement de la capitale. Aux alentours de 6h, Martin Arumburu était attablé à la terrasse d’un établissement de la rue Mabillon aux côtés de son ami et ancien coéquipier du Biarritz Olympique Shaun Hegarty.
Selon le récit des avocats, les deux hommes seraient venus en aide à une tierce personne qui venait d’être éconduite par trois autres individus, dont le principal suspect Loïc Le Priol, à qui il venait de demander du feu. Une bagarre, qualifiée d’«hyper violente», aurait alors éclaté.
«J’entends un homme - que j’identifie aujourd’hui comme étant Le Priol - hurler, mais vraiment hurler, des insultes et toujours en direction d’une seule et même personne, dont je ne sais pas, à ce moment-là, de qui il s’agit», a confié l’homme qui était herbégé à proximité des lieux et qui a été réveillé par les cris. «Malgré l’heure, il y a beaucoup de gens aux fenêtres, ce qui témoigne de la violence de la scène. C’est tellement violent, déterminé, et l’homme au sol ne réagit tellement pas, qu’une fraction de seconde je me dis qu'il a dû merder et qu'il ‘accepte’ de prendre une raclée», a-t-il ajouté.
Martin Aramburu n’aurait en effet pas cherché à riposter et à se faire justice. «Aramburu s’est fait éclater mais il n’a jamais rendu les coups. Il était droit. Shaun et lui ont dû se dire : ‘On est tombés sur deux débiles, ils ont la vingtaine, ils sont bourrés - ça a dû leur arriver 20 fois dans leur vie - viens on se casse, on rentre à l’hôtel !’», a indiqué le témoin.
De son côté, Loïc Le Priol semblait plus déterminé à en découdre. «Il tente d’y retourner, il continue de hurler des insultes mais il est empêché par quelqu’un que je n’ai pas identifié. Je suis persuadé que s’il avait pu y retourner, il y serait retourné. Je pense que s’il avait pu le tuer avec ses poings, il l’aurait tué avec ses poings», a assuré l'homme.
Six coups de feu très proches
Et une fois à l’extérieur de l’établissement, il aurait même tenté de sortir quelque chose de sa poche. «A un moment, les deux gars (les suspects, ndlr) sont repoussés dans la rue de Buci. Là, je me souviens de voir un type retenir Le Priol qui tente de sortir à plusieurs reprises un truc de sa poche ! J’ai voulu crier, je ne l’ai pas fait. Je me suis dit : ‘ils vont me prendre pour un taré’. Je me suis dit au pire c’est un couteau. Des bastons, j’en ai vu, mais là, c’est bizarre, c’est la première fois que j’avais le pressentiment que ça pouvait partir plus loin. Il (l’agresseur présumé) paraissait tellement déterminé. Personne ne semblait pouvoir le calmer», a ajouté le témoin.
Shaun Hegarty et Federico Martin Aramburu sont néanmoins parvenus à s’enfuir et à prendre la direction d’un hôtel, où ils ont demandé des glaçons pour soigner leurs blessures au visage. Mais quelques instants plus tard, six coups de feu très proches ont éclaté et Martin Aramburu a été mortellement touché à plusieurs reprises. Malgré l’intervention des secours, il a succombé. «Je me lève, je hurle. J'appelle les flics. Je leur décris ce que j'ai vu. En même temps, je réveille la personne qui m'héberge, je raccroche et je fonce. Je tombe sur deux-trois personnes au croisement Buci-Saint-Germain. Je leur demande dans mes souvenirs un truc du genre : ‘c'est en lien avec la baston’ et un me répond, hyper calme : ‘ils l'ont descendu ! ‘», a raconté le témoin encore traumatisé par ce qu’il a vécu ce matin-là.
Extradé de la Hongrie vers la France le 1er avril, Loïc Le Priol, présenté comme le principal suspect, a été mis en examen pour des chefs d’assassinat et a été placé en détention provisoire. Proche du militant d'extrême droite, Romain Bouvier, 31 ans, a également été mis en examen pour «assassinat» et deux délits liés à la détention d'armes. Ecroué à la prison de la Santé à Paris, il est soupçonné d'avoir lui aussi tiré sur Aramburu.
Une femme de 24 ans, présentée comme la petite amie de Loïk Le Priol, a également été mise en examen dans cette affaire pour «complicité d’assassinat». Placée elle aussi en détention provisoire, elle est soupçonnée d'avoir conduit, le soir des faits, un véhicule appartenant à Loïk Le Priol.