Noémie Michallet, femme de Jordan, ouvreur de Rouen, qui s’est suicidé en janvier dernier, s’est confié dimanche au micro du Canal Rugby Club.
Agé de 28 ans, le joueur de ProD2, qui avait été retrouvé au pied d’un immeuble après une chute, souffrait de dépression comme le confie sa femme.
«J’ai souhaité prendre la parole pour rendre hommage à Jordan, pour dire quel homme merveilleux il était, et aussi pour dénoncer toutes les souffrances que les joueurs peuvent ressentir tout au long de leur carrière, ou même après, a confié Noémie Michallet. (…). Voilà, il traversait une petite semaine, avec une baisse de moral, mais comme ça peut arriver à tout le monde. Il était très fatigué, moralement et physiquement. Il avait une certaine pression parce que le club se retrouvait près de la zone de relégation. Mais il avait toujours ce sourire sur lui. On venait de faire l’échographie de notre enfant et il était très, très heureux de savoir qu’on attendait une petite fille. (…) Il m’avait dit avant que 2022 serait la plus belle année de sa vie, avec la construction de notre famille. Vraiment, aucune action ou aucune parole ne pouvait présager un tel geste. Ce geste représente l’inverse de Jordan.»
"Ce n'est pas facile car c'est un milieu dans lequel on doit toujours être fort (...)"
Suite à la disparition tragique de Jordan Michallet, sa femme Noélie a souhaité prendre la parole pour lancer un cri d’alarme pour briser le tabou de la dépression dans le rugby. pic.twitter.com/RtFypiGQaj— Canal Rugby Club (@CanalRugbyClub) March 5, 2022
Malheureusement, comme de nombreux sportifs, le tabou de la dépression et du stress a empêché Jordan Michallet d’en parler à ses coéquipiers et son équipe.
«Il m’avait dit : “Je n’ai pas le droit de lâcher l’équipe”. Pour lui, c’était impensable d’avoir ne serait-ce que quelques jours de repos, explique-t-elle. Ça le rendait malade d’être affaibli, fatigué. Pour lui, c’était impensable de devoir abandonner ses coéquipiers. Le problème, c’est que c’est allé très, très vite. En une semaine, tout s’est dégradé. Et Jordan n’a pas osé en parler, ou alors trop tard. Je sais que, au club de Rouen, s’ils avaient eu le ressenti de Jordan, ils auraient été là pour lui. Ils l’auraient aidé. Malheureusement, un joueur a toujours honte d’avouer ses faiblesses, honte de dire qu’il va mal ou qu’il est fatigué. Et je pense qu’il a eu peur du jugement.»
Depuis le suicide de son mari, Noémie Michallet confie recevoir de nombreux messages et témoignages : «Depuis ce drame, j'ai reçu beaucoup de témoignages de joueurs, français ou étrangers. Pas un ne m'a pas dit qu'il n'avait pas connu une dépression. Mais aucun n'a osé en parler, ni à ses coéquipiers, ni à ses entraîneurs. C'est un milieu où il faut toujours être fort, où il faut toujours donner le meilleur de soi-même. On joue avec des blessures, avec des douleurs extrêmes pendant les matchs. Quand on m'a dit ça, j'ai compris qu'il n'y avait pas que Jordan. J'ai pu ressentir le mal-être de certains joueurs.»