D'après les télescopes de la Nasa près de 28.000 astéroïdes géocroiseurs (NEA) gravitent autour de la Terre. Puisque leurs orbites croisent la nôtre, ils sont étroitement surveillés afin d'évaluer le risque d'impact. Le nombre de NEA augmentant, la Nasa a développé un algorithme permettant de les pister tous en même temps.
Le Center for near earth object studies (CNEOS) surveillait déjà le risque d'impact de chaque astéroïde géocroiseur grâce au programme Sentry, depuis 2002. Développé par le Jet propulsion laboratory (JPL) de la Nasa, il permettait d'obtenir la probabilité d'impact d'un astéroïde au cours des 100 prochaines années.
Nearly 28,000 near-Earth asteroids can be a lot to keep track of! A JPL-led next-generation impact monitoring system called Sentry-II is now online to better evaluate their future risk of Earth impact: https://t.co/v0CJVaXPo2 pic.twitter.com/NhzW7piWOV
— NASA JPL (@NASAJPL) December 6, 2021
Un outil crucial, que la Nasa a voulu améliorer pour anticiper l'augmentation des découvertes de NEA prédite par ses télescopes d'enquête. Sachant qu'à l'heure actuelle, environ 3.000 nouveaux astéroïdes géocroiseurs sont trouvés chaque année.
Les chercheurs ont donc conçu Sentry II, qui, selon l'étude publiée dans The Astronomical Journal le 1er décembre dernier, est capable de calculer rapidement les probabilités d'impact pour tous les NEA connus à la fois. Il signale ensuite les objets les plus à risque, selon leur trajectoire par rapport à celle de la Terre. Tous les impacts potentiels sont analysés, y compris ceux qui n'ont que quelques chances sur 10 millions de se produire.
Pour cela, il doit prendre en compte de nombreuses variables, notamment les multiples forces gravitationnelles qui affectent la trajectoire d'un astéroïde. En effet, lorsqu'il traverse le système solaire, ce corps céleste est soumis à l'attraction gravitationnelle du Soleil mais aussi à la gravité des planètes autour. Ces éléments dictent la trajectoire du NEA de manière prévisible.
La première version de Sentry était capable de modéliser avec précision l'impact de ces forces sur la trajectoire d'un astéroïde. En revanche, le programme ne pouvait pas rendre compte des forces non gravitationnelles, telles que les influences thermiques liées à la chaleur du Soleil. En chauffant l'une des faces de l'astéroïde, ce dernier lui donne en effet une légère impulsion, générée par l'énergie infrarouge.
Sentry II, lui, est capable de calculer ce phénomène, que l'on appelle l'effet Yarkovsky. De la même façon, il peut, contrairement à sa précédente version, prédire avec précision la probabilité d'impact des astéroïdes qui, soumis à des rencontres particulièrement rapprochées avec la Terre, voient leur mouvement grandement dévié par la gravité de la planète bleue. Cet algorithme nouvelle génération réduit ainsi les incertitudes orbitales post-rencontre.
Lorsqu'un nouveau NEA est détecté, les astronomes signalent ses positions observées dans le ciel et ces données sont utilisées pour déterminer l'orbite la plus probable de l'astéroïde autour du Soleil. Mais les chercheurs savent qu'il existe toujours de légères incertitudes sur la position exacte de l'objet céleste, ce qui signifie que sa véritable orbite se situe en réalité quelque part à l'intérieur d'une «région d'incertitude» qui regroupe toutes les trajectoires possibles.
Des aiguilles dans une botte de foin
Sentry II est plus efficace que l'algorithme d'origine pour analyser ces données. Pour rendre compte de cette progression, Davide Farnocchia, ingenieur en navigation au JPL, compare le processus à la recherche d'aiguilles dans une botte de foin.
Ici les scénarios d'impact possible sont donc les aiguilles tandis que la région d'incertitude est la botte de foin. Cette dernière est d'autant plus grosse que la position de l'astéroïde est incertaine. La première version de Sentry déterminait une ligne s'étendant à travers la botte de foin, le long de laquelle elle estimait le plus probable de trouver des aiguilles, et piquait au hasard des milliers de fois.
Sentry II ne formule pas d'hypothèse mais lance des milliers d'aimants au hasard partout dans la botte de foin. Attirés par les aiguilles à proximité, ils permettent de toutes les trouver, sans exception. Ainsi la Nasa ne laisse aucunes des trajectoires possibles au hasard et surveille d'encore plus près celles qui pourraient amener ces géocroiseurs à côtoyer la Terre d'un peu trop près.