Le patron des sports de glace Didier Gailhaguet, dont la ministre Roxana Maracineanu a demandé lundi la démission dans le contexte des révélations sur les agressions sexuelles dans le patinage, a indiqué mardi qu'il ne prendrait pas de décision avant la fin de l'inspection diligentée par le ministère des Sports.
"La ministre ayant annoncé qu'elle mettait en place une inspection générale, le président de fédération que je suis attendra les résultats de cette inspection avant de prendre une décision sur une démission demandée par Madame la ministre", a déclaré M. Gailhaguet en soirée en marge d'un bureau exécutif extraordinaire de la Fédération française des sports de glace (FSG) organisé au siège de l'organisation à Paris.
"Un dysfonctionnement général existe au sein de la Fédération française des sports de glace (...). Au regard des révélations et des témoignages que j'ai pu recueillir, Didier Gailhaguet ne peut se dédouaner de sa responsabilité morale et personnelle, je lui ai donc demandé d'assumer toutes ses responsabilités et de démissionner du poste de président de la Fédération française des sports de glace", avait expliqué Maracineanu après l'entretien qu'elle avait eu avec lui lundi.
Dans son livre (Un si long silence, Plon), les accusations d'Abitbol portent sur les années 1990 à 1992, une période prescrite.
Gilles Beyer, champion de France 1978, est alors un entraîneur de haut niveau, avant de succéder en 1998 à Gailhaguet au poste de directeur des équipes de France, quand ce dernier devient pour la première fois président de la FFSG.
Mais au début des années 2000, il est visé par la plainte d'une autre patineuse, classée sans suite, puis au centre d'une enquête administrative, menée par des inspecteurs généraux de la jeunesse et des sports, après un signalement de parents.
Cette enquête a conduit à l'époque le ministère des Sports à mettre fin à ses fonctions de cadre technique à la fédération des sports de glace. Pourtant, Gilles Beyer va garder une place centrale au club parisien des Français volants, dont il apparaissait encore la semaine dernière comme manager, ainsi qu'à la fédération, où il a occupé un poste au bureau exécutif jusqu'en 2018. Les Français Volants sont basés à Bercy, place forte du haut niveau français. En 2006, Gilles Beyer intervenait aussi comme coordinateur d'une tournée de galas de l'équipe de France de patinage artistique.
Dès mercredi soir, le ministère des Sports avait fait savoir que Roxana Maracineanu attendait que Didier Gailhaguet lui explique comment Beyer «a pu se retrouver dans l'écosystème», alors qu'«il est tout à fait improbable que la fédération n'ait pas eu connaissance des mesures prises à son encontre».
«arme atomique»
Dans une déclaration à l'AFP vendredi, Gilles Beyer, 62 ans, a concédé des «relations intimes» et «inappropriées» avec Sarah Abitbol, en lui présentant des excuses que cette dernière a immédiatement refusé. Dans L'Equipe, l'ancien entraîneur a aussi été accusé par une autre ancienne patineuse, Hélène Godard, d'avoir eu des rapports sexuels avec elle, alors qu'elle avait 13 et 14 ans, à la fin des années 70.
Mais dans le milieu sportif, beaucoup pensent que Gailhaguet, à qui le ministère a refusé qu'il soit accompagné de son avocat lundi, en a vu d'autres.
L'ancien patineur, qui fut l'entraîneur de Surya Bonaly (1985-92), est devenu président de la fédération en 1998, l'année où Roxana Maracineanu devenait la première Française championne du monde de natation. Depuis, treize ministres et secrétaires d'Etat aux Sports se sont succédés.
Ce n'est pas la première fois que Didier Gailhaguet est dans le collimateur. Eclaboussé par une affaire de tricherie aux JO de Salt Lake City en 2002, il avait été interdit de toute fonction dans le patinage international pendant trois ans. Il avait également dû démissionner en 2004 de la présidence de la FFSG, après un rapport de la Cour des comptes dénonçant des dérives de gestion, mais il avait retrouvé la tête de la fédération en 2007.