Après leur victoire face aux Raptors, la nuit dernière, les Denver Nuggets pointent à la première place de la conférence Ouest. Une surprise ? Pas vraiment en fait, et on vous explique pourquoi.
Quel est le point commun entre les Warriors, les Lakers, les Raptors, les Celtics, et le Thunder, hormis le fait qu’elles soient toutes classées dans le Top 5 de leur conférence respective ? Toutes se sont inclinées face aux Nuggets cette saison. Un joli tableau de chasse, n’est-ce pas ? On pourrait même préciser que Toronto, qui détient le meilleur record de la ligue actuellement, vient de perdre à deux reprises en l’espace de deux semaines face à Denver.
Alors oui, il est probablement encore trop tôt pour tirer des conclusions concernant les réelles chances des hommes de Mike Malone de jouer les trouble-fêtes lors des playoffs NBA. Mais s’ils continuent sur leur lancée, les Nuggets sont clairement un adversaire qu’aucune autre équipe de la conférence Ouest n’aura envie de croiser à l'entame des phases finales. Et ce pour trois raisons majeures.
Une défense enfin fonctionnelle
Denver possède actuellement la 4e meilleure défense de la ligue selon NBA.com, et se place en pole position sur le pourcentage des tirs à trois points adverses. Pour une équipe qui, ces trois dernières saisons, végétait dans les bas-fonds du classement dans ces deux catégories, cela tiendrait presque de l’exploit. Surtout que l’effectif n’a pratiquement pas évolué, si ce n’est la signature de Paul Millsap en juillet 2017 (un excellent défenseur certes, mais qui ne saurait résumer à lui seul les progrès au niveau collectif), entre la saison passée et celle-ci. Selon le site américain FiveThirtyEight.com, l’évolution des schémas défensifs utilisés par Mike Malone, le coach, et son staff – notamment concernant la couverture défensive sur les pick&roll impliquant Nikola Jokic – contribue grandement à cette embellie.
Le degré d’effort fourni par les joueurs en défense – quel concept révolutionnaire ! – et plus particulièrement sur les rotations défensives et les lignes de passes, est également plus intense. Regardez un match de Denver (psssst, NBA League Pass est gratuit pendant sept jours en ce moment), et vous verrez une équipe en perpétuel mouvement afin de combler les brèches et contrarier l’attaque adverse à chaque seconde. Résultat, les Nuggets ne sont plus contraints de réaliser le match offensif parfait pour espérer l’emporter, et peuvent se reposer sur leur efficacité défensive pour se maintenir dans la partie. Et éventuellement s’imposer quand sonne le buzzer final. « Avant, si nous avions des difficultés à mettre nos tirs, nous perdions la plupart du temps. Notre état d’esprit désormais est que nous allons rester dans le match grâce à notre défense, et que nous allons éventuellement mettre assez de tirs pour l’emporter », expliquait l’assistant-coach Wes Unseld Jr. en novembre dernier selon le site The Ringer. Une analyse qui continue de se vérifier aujourd’hui, et ce malgré les multiples blessures qui touchent l’effectif depuis le début de la saison.
Un effectif plein de ressources
Les Nuggets sont actuellement privés de trois titulaires. Un handicap capable de plomber n’importe quelle équipe de la ligue, surtout que Denver vient de jouer le cinquième calendrier le plus difficile de la ligue depuis la mi-octobre selon le site ESPN. Will Barton, qui devrait bientôt faire son retour, n’a joué que deux matches cette saison. Gary Harris, solide défenseur et joueur clef en attaque, ainsi que Paul Millsap, l’ont récemment rejoint à l’infirmerie. Et on peut également préciser qu’Isaiah Thomas, tout comme le prometteur rookie Michael Porter Jr., n’ont toujours pas foulé les parquets. Des absences qui n’ont, toutefois, en rien freiner l’ascension des Nuggets vers le sommet de la conférence Ouest. Et cela grâce à l’excellent recrutement de la direction ces dernières années.
Si on savait que Jamal Murray était un excellent joueur capable de planter des tirs dans tous les sens sur le terrain, il n’était pas évident de deviner que les Juancho Hernangomez, Trey Lyles, Mason Plumlee, Torrey Graig, Monte Morris ou encore Malik Beasley, seraient à ce point efficaces au moment de voir leur temps de jeu doubler afin de pallier les absences des titulaires. Ces six joueurs possèdent tous des qualités, et des limitations, mais tous démontrent une envie de jouer et de se battre à chaque instant passé sur le terrain. Une énergie qui leur permet d'être l'équipe qui prend le plus de rebonds de toute la NBA, et d'être en troisième position en points inscrits après un rebond offensif. Ils se fondent parfaitement dans le collectif, tentent de réduire au maximum leurs erreurs, et savent se positionner sur le terrain pour profiter des éclairs de génie d’un pivot au talent transcendant (oui, le mot est fort, mais justifié) capable de les trouver les yeux fermés à partir du moment où ils sont démarqués.
Nikola Jokic, un joueur révolutionnaire
Nikola Jokic ne correspond pas vraiment – voir pas du tout – à l’image classique que l’on se fait de la « superstar de la NBA ». Au premier regard, il paraît être en léger surpoids, ne sait manifestement pas sauter plus haut qu’une dizaine de centimètres, et n’est pas du genre à planter 50 points dans la tête de l’adversaire parce qu’il en a décidé ainsi. Mais derrière cette sympathique bonhomie se cache un pivot absolument révolutionnaire dont l’impact sur le terrain force le respect, et devrait clairement le propulser dans la conversation pour le titre de MVP cette saison (le contraire serait simplement honteux). Nikola Jokic a le don de rendre les joueurs autour de lui « meilleurs » qu’ils ne le sont. Et cela a toujours été la marque des joueurs d’exception. Passons désormais aux arguments permettant d’affirmer cela.
Selon le site ESPN, et son outil de mesure baptisé « Real Plus-Minus » sur l’impact offensif ET défensif d’un joueur sur le terrain, Nikola Jokic pointe en seconde position derrière Anthony Davis. Il est le meilleur marqueur, rebondeur, passeur et intercepteur de son équipe. Il apparait en bonne position dans la liste des meilleurs défenseurs proche du cercle (devant Anthony Davis, Andre Drummond ou Steven Adams pour ne citer qu’eux). Son « Net Rating », qui mesure le rapport d’efficacité entre la défense et l’attaque sur les résultats de l’équipe, est supérieur à celui de Joel Embiid, le pivot de Sixers considéré comme étant un des meilleurs intérieurs de la ligue. Il est habituellement adroit derrière la ligne des trois points (il ne plante toutefois que 29,6% de ses tirs longue distance cette saison, contre un excellent 39,6% la saison passée, mais les défenses sont obligées de sortir sur lui). Et se révèle être un excellent joueur dos au panier. Il est capable de planter un triple-double à n’importe quel match, et à même rejoint Wilt Chamberlain dans le livre des records en octobre dernier après un triple-double avec 100% de réussite aux tirs.
Nikola Jokic put up a monster triple-double in the @nuggets win, recording 35 PTS, 12 REB, 11 AST on a perfect 11-11 from the field!
He joins Wilt Chamberlain as the only players to record a triple-double while perfect from the field. (Min 10 FGM)#SAPStatLineOfTheNight pic.twitter.com/nSizoWLHng— NBA.com/Stats (@nbastats) 21 octobre 2018
Mais Nikola Jokic est surtout en train s’imposer comme le meilleur pivot-passeur de l’histoire de la NBA. Il est le seul pivot à avoir distribué au moins 15 passes décisives en un match ces 30 dernières années selon le journaliste Tim Bontemps du site ESPN. Un exploit qu’il a déjà réalisé à trois reprises. Dont deux fois rien que cette saison. Mieux encore, il parvient à délivrer des passes complètement ahurissantes, comme celle-ci face aux Raptors au début du mois de décembre.
What is this sorcery by Nikola Jokic? pic.twitter.com/LUqaUXWq8e
— Kevin O'Connor (@KevinOConnorNBA) December 4, 2018
L’altruisme de Nikola Jokic a tendance à déteindre sur ses coéquipiers, ces derniers n’hésitant pas à faire tourner le ballon pour trouver le meilleur tir possible. Une générosité contagieuse qui permet aux Nuggets de pointer en troisième position des équipes qui distribuent le plus de passes décisives par match selon NBA.com, juste derrière les Warriors et les Sixers. Vous pouvez être certain que Nikola Jokic, qui n’a que 23 ans, rappelons-le, sera un All-Star cette saison. Et si jamais les Nuggets, qui n’ont plus participé aux phases finales depuis 2013, parviennent à faire du bruit en playoffs, il ne sera pas complètement exclu de voir le pivot serbe figurer parmi les favoris pour le titre de MVP de la saison. Et ce ne sera qu’amplement mérité.