Annegret Kramp-Karrenbauer, 56 ans, a été élue ce vendredi 7 décembre à Hambourg présidente de la CDU, pour remplacer à ce poste Angela Merkel, contrainte de le quitter après dix-huit ans de règne. Cette accession lui ouvre à terme la possibilité de devenir chancelière.
Inconnue en Allemagne il y a encore un an
Jusqu'à récemment, Annegret Kramp-Karrenbauer était quasiment inconnue du grand public en Allemagne. Il faut dire que sa carrière politique s'était faite au niveau local. Après des études de droit et de sciences politiques, elle entre en 2000 au gouvernement de Sarre, un petit Land à la frontière avec la France d'où elle est originaire : elle y est tour à tour ministre régionale de l'Intérieur, du Travail, de la Famille, des Sports, de la Justice.
En 2011, elle prend la tête de la région, où elle est très populaire, notamment pour son sens de l'auto-dérision. C'est seulement en mars 2017 qu'elle acquiert une notoriété nationale, en remportant des élections locales très serrées dans son Land contre ses adversaires sociaux-démocrates. Après sept ans dans cette petite région, la discrète dirigeante rejoint Berlin en février dernier en tant que secrétaire générale du parti conservateur CDU.
Une «Merkel bis»
«Merkel bis», «Merkel 2», «Mini-Merkel», «Merkel de la Sarre»... Les nombreux surnoms d'Annegret Kramp-Karrenbauer témoignent de sa proximité avec la chancelière actuelle. Cette catholique revendiquée partage en effet la ligne politique plutôt centriste d'Angela Merkel. C'est même cette dernière qui l'a appelée pour devenir secrétaire générale de la CDU, lui mettant le pied à l'étrier.
Au niveau du style, «AKK» - l'un de ses autres surnoms - et Angela Merkel se rejoignent aussi. La nouvelle présidente de la CDU n'a, comme la chancelière, rien d'une oratrice brillante. Elle ne fait pas de manières, ce que certains de ses adversaires considèrent comme un manque de charisme.
Cette mère de trois enfants a également le même goût pour les compromis. Lorsqu'elle était ministre-présidente de la Sarre, entre 2011 et 2018, elle a d'abord gouverné avec les écologistes et les libéraux. Après le départ de ces derniers, elle n'a pas hésité à s'allier avec les sociaux-démocrates.
Contre le mariage pour tous
Même si globalement la nouvelle présidente de la CDU est sur la même ligne politique qu'Angela Merkel, cela ne l'empêche pas de s'en différencier sur certains points, et notamment sur les sujets sociétaux. Ainsi, elle s'oppose fermement au mariage pour tous. En 2015, elle avait suscité une polémique en disant que celui-ci risquait d'ouvrir la porte à l'inceste et à la polygamie. Elle est également contre la suppression du paragraphe 219a du code pénal allemand, qui réprime la publicité pour l’avortement.
Au sujet des migrants, AKK est également plus radicale que son modèle. Elle a ainsi formulé des critiques mesurées contre l'ouverture de l'Allemagne en 2015 à des centaines de milliers de demandeurs d'asile, décidée par Angela Merkel. Elle réclame un durcissement de la politique migratoire, symbolisé par sa volonté d'expulser immédiatement tout réfugié reconnu coupable d'acte criminel, y compris des Syriens.
Elle défend des idées économiques de gauche
Sur le plan économique, cette ancienne ministre appartient à l'aile gauche de la CDU. Elle a notamment défendu l'idée d'un salaire minimum avant que le gouvernement d'Angela Merkel ne l'instaure en 2015, ainsi que l'imposition des plus riches à 53 %.
Ces dernières semaines, elle a ainsi reçu le soutien de l'Organisation des travailleurs chrétiens-démocrates (CDA), considérée comme l’aile «sociale» de la CDU.